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MÉROVINGIENS

de Théodebert, dont Grégoire de Tours raconte les exactions, sont des comtes de ville, établis dans l’intérieur de leurs murs, à côté de leur évoque. Il y aurait de l’exagération à dire que la province a disparu, mais elle est désorganisée, sans consistance, presque sans réalité. La ville, l’élément primitif du monde romain, survit presque seule à sa ruine. »

C’est qu’une organisation nouvelle allait peu à peu se former, dont la ville ne serait plus l’unique élément, où la campagne, comptée pour rien dans les temps anciens, prendrait place à son tour. Il fallait des siècles pour fonder cet ordre nouveau. Toutefois, dès l’âge de Clovis deux choses furent accomplies, qui le préparaient de loin.

D’une part, l’unité de l’armée barbare fut assurée : Clovis fit périr tous les petits rois des Francs par une suite de perfidies[1]. L’Église, préoccupée de l’idée d’unité, applaudit à leur mort. « Tout lui réussissait, dit Grégoire de Tours, parce qu’il marchait le cœur droit devant Dieu[2]. » C’est ainsi que saint Avitus, évêque de Vienne, avait félicité Gondebaud de la mort de son frère, qui terminait la guerre civile de Bourgogne. Celle des chefs francs, wisigoths et romains, réunit sous une même main toute la Gaule occidentale, de la Batavie à la Narbonnaise.

  1. App. 83.
  2. Prosternebat enim quotidie Deus hostes ejus sub manu ipsius, et augebat regnum ejus, eo quod ambularet recto corde coram eo, et faceret quæ placita erant in oculis ejus. — Ces paroles sanguinaires étonnent dans la bouche d’un historien qui montre partout ailleurs beaucoup de douceur et d’humanité.