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chap. 3e
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DES BETTERAVES.


pe les tiges et les feuilles de cette plante, et qu’on les fait sécher à l’ombre, autant que faire se peut, pour les conserver souples. Les feuilles s’emploient telles qu’elles sont, mais il faut aplatir les tiges avec un maillet ou les faire passer dans une espèce de laminoir pour les aplatir et les rendre plus souples. Le plus grand usage des unes et des autres est d’en former des couvertures de petits bâtimens dans les campagnes ; on en fait aussi des nattes, des paillassons qui durent longtemps ; on en rembourre les chaises avec plus d’avantage qu’avec de la paille. On a en vain cherché à utiliser la soie, assez abondante, qui se trouve dans l’épi dense (massette) des fleurs de cette plante, mais on n’en a obtenu aucun résultat satisfaisant.

Fig. 28.

§ V. — Du Scirpe.

Scirpe des étangs (Scirpus lacustris. Lin. ; angl., Marsh club-rush ; all., Sumpfbense, Sumpfsende, Riesch ; ital., Scirpo acquatico). Cette cypéracée est très-vivace et se trouve abondamment dans les étangs et dans les rivières. Elle a les tiges cylindriques, un peu diminuées de grosseur dans le haut, longues de 7 à 8 pieds, et terminées par des fleurs en épis paniculés.Les botanistes ne parlent pas de ses feuilles, probablement parce qu’ils n’en ont pas vu ; en effet, lorsque la plante croit dans les étangs dont l’eau est tranquille, elle n’en produit pas ; mais, dans les rivières, les gaines qui embrassent le bas des tiges se développent en rubans minces, flexibles, larges de 3 lignes, plus longs que les tiges, s’élèvent et flottent à la surface de l’eau, dans la direction du courant. J’ai découvert ce fait en cherchant à connaître quelle sorte de plante formait chaque année une masse de verdure flottante au milieu de la Seine, vis-à-vis Bercy, à des époques où on n’y apercevait aucune tige de scirpe. Quand les tiges de scirpe parurent et furent en fleurs, la flottille des feuilles était presque détruite, mais j’en trouvai une assez grande quantité dans toute leur longueur, adhérentes encore à la souche des scirpes et engaînant un peu leurs tiges à la base, pour que je puisse assurer que le Scirpus lacustris produit des feuilles aussi longues que ses tiges dans l’eau courante de la Seine. Je pense que ce sont ces feuilles que Dalibard a prises pour les feuilles de la Valisneria spiralis qu’il avait cru avoir trouvée dans la Seine.

C’est quand les tiges du scirpe sont en fleurs qu’on les juge assez mûres pour être coupées. On les fait sécher à l’ombre, on les aplatit et on en fait des nattes tressées pour les appartemens, des couvertures de petits bâtimens dans les campagnes, des abris et des paillassons plus durables que ceux faits en paille.

Poiteau.

CHAPITRE III. — Des plantes économiques.


Section 1re. — De la Betterave.
§ 1er. — Avantages et emplois de la betterave.

Les avantages que présente la betterave comme plante saccharine, sont maintenant démontrés par la prospérité irrécusable le nombreux établissemens, où l’on se livre avec le plus grand succès à l’extraction du sucre que renferme sa racine. Cette industrie, d’origine toute française, après avoir été dédaignée à sa naissance, conspuée même par les étrangers, languissante alors que le sucre était à un prix exorbitant, prend, depuis quelques années, un essor qui va toujours croissant, parce que le perfectionnement des procédés, les conseils et la persévérance des hommes habiles qui y voyaient une source de richesse agricole, l’aplomb manufacturier toujours si lent à s’acquérir dans une industrie nouvelle, y font actuellement trouver à un grand nombre de fabriques des bénéfices assurés et considérables, malgré la baisse des prix dune denrée devenue de première nécessité.

Si l’on considère que la consommation du sucre n’est encore en France que de 2 1/2 à 3 livres par individu, tandis qu’en Angleterre et en Hollande elle approche de 16 livres, on reconnaîtra que l’avenir le plus brillant attend cette industrie toute nationale ; M. de Dombasle vient de démontrer qu’elle n’est pas éloignée de l’époque où elle pourra livrer le sucre brut à 20 cent, la livre, et où, propagée sur tout le sol français, sans diminuer la culture des plantes panaires, elle donnera partout un produit nouveau qui fournira à la fois à la population laborieuse, une ressource alimentaire d’une très-grande importance, et des moyens de travail qui accroîtront considérablement son aisance. Mais, que des droits onéreux, des entraves gênantes ne viennent pas arrêter cette prospérité naissante ! sur beaucoup de points, cette industrie on est encore à des tâtonnemens ; arrivée à une période d’effervescence et de progrès, elle est loin d’être fixée irrévocablement ; et des mesures décourageantes ne sauraient manquer de faire périr une foule d’établissemens et d’empêcher la fonda-