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AGRICULTURE : DES PLANTES FOURRAGÈRES.


pomme-de-terre blanche commune, affirme que, toutes circonstances égales, l’avantage a toujours été en faveur du topinambour dont la supériorité de produit s’est quelquefois élevée au tiers en sus, et souvent au quart. M. V. de Tracy évalue la récolte en tubercules à 8 ou 9 fois la semence dans le sol argilo-siliceux de son domaine, c’est-à-dire à 120 ou 140 hectolitres par hectare ; il estime le produit en fourrage vert à 16 ou 20 chars de 1500 livres environ, aussi par hectare.

C. B. de M.

CHAPITRE XVIII. — des plantes a fourrages.

L’industrie manufacturière demande au commerce la matière première qu’elle lui restituera plus tard sous une autre forme. L’industrie agricole peut trouver presque toujours en elle-même toutes ses ressources. — La terre est son vaste laboratoire ; les herbes qu’elle nourrit deviennent un premier moyen de production ; avec elles il est facile d’entretenir et de multiplier les animaux indispensables aux besoins de la grande culture, sinon comme objets de vente, au moins comme agens de travail et producteurs des fumiers à l’aide desquels on peut ensuite demander au sol toutes les plantes utiles à la nourriture de l’homme et aux besoins de la fabrication.

Sans les herbages il n’est pas d’agriculture possible ; — avec eux, il en est rarement d’impossible. Malheureusement, on ne trouve pas toujours aussi facile qu’on pourrait le croire d’en obtenir une suffisante quantité, ou, ce qui revient au même, à des conditions pécuniaires assez avantageuses. Avant de faire connaître les principales difficultés que rencontre à cet égard la pratique, et d’indiquer autant qu’il sera en moi les moyens de les lever, je chercherai à classer les diverses sortes d’herbages, afin de rendre mon travail à la fois plus méthodique, plus concis, d’une exécution et d’une intelligence plus faciles.

Tous les herbages fourragers peuvent être compris sous deux titres principaux : les pâturages, c’est-à-dire ceux dont les produits sont consommés sur place par les bestiaux ; — les prairies, dont la récolte se fait à l’aide de la faulx.

Les pâturages sont dits naturels lorsqu’on abandonne le soin de leur formation à la seule nature ; — artificiels lorsqu’ils sont formés, par le moyen des semis, d’espèces particulières cultivées isolément ou plusieurs ensemble, et qui, dans presque tous les cas, ne croîtraient pas spontanément sur le terrain auquel on juge avantageux de les confier.

Les pâturages naturels ou artificiels sont permanens, c’est-à-dire d’une durée illimitée, ou temporaires, c’est-à-dire d’une durée limitée par la nature des assolemens dont ils font partie.

Les prairies sont aussi naturelles ou artificielles dans les mêmes circonstances et par les mêmes raisons que les pâturages, c’est-à-dire qu’on doit comprendre sous la seconde désignation toutes celles dont les herbages ne sont pas le produit d’une végétation spontanée, qu’elles appartiennent exclusivement à l’une des grandes familles des graminées ou des légumineuses, ou à un mélange de plantes diverses, semées simultanément dans le but d’ajouter à la bonté ou à la masse totale des foins.

Eu égard à la nature des terrains qu’elles couvrent, au mode de leur culture, à la richesse ou à la qualité de leurs produits, les prairies de l’une ou l’autre origine se distinguent en prés secs, dits à une herbe, parce que, sauf le cas où il est possible de les arroser, on ne peut généralement les faucher qu’une fois ; — prés bas, regaignables ou de deux herbes, et prés marécageux.

Selon la place qu’elles occupent dans les assolemens a court ou à long terme, ou en dehors de tout assolement, on les subdivise en annuelles, bisannuelles et vivaes ; — temporaires ou permanentes, etc., etc.

Section 1re . — Des pâturages.

Avant l’introduction encore moderne des prairies artificielles et des racines fourragères, les herbages naturels, sous leurs deux modifications de pâturages et de prairies, formaient la base de l’agriculture européenne. A toutes les époques où les bras manquèrent aux travaux de la terre et où la consommation restreinte des produits du sol le laissa sans grande valeur, nul autre système ne dut être préféré à celui-là. Il fallait produire avec le moins de travail possible, et tandis que les pâturages permanens en offraient le moyen, il était tout simple de chercher dans leur étendue une compensation à leur faible rapport, car la terre était peu de chose aux yeux de celui qui la possédait au-delà de ses moyens de culture. Toutefois ce qui fut bon alors a cessé de l’être aujourd’hui, ou du moins la règle est devenue l’exception à mesure que les populations plus pressées durent ménager davantage la terre et épargner moins le travail. Les bonnes prairies ont peu perdu à la vérité de leur importance, mais les prairies artificielles ont généralement remplacé les pâturages, parce qu’à leur aide on a pu, sur de moindres étendues, augmenter le nombre des bestiaux. Ce n’était pas assez de ce premier résultat : afin d’éviter toute perte de fumiers, au lieu de laisser vaguer comme autrefois les bestiaux, on a compris l’avantage de les nourrir presque