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Le tumulte des voix confuses retentissait dans les airs, et formait un nuage opaque. Ainsi que des chats, une bande poétique grimpait le long de la montagne, faisant effort pour atteindre la cime bien gardée. De temps à autre, ils redoublaient de zèle, et au moyen de frondes et d’arbalètes, ils lançaient des livres entiers qui partaient en sifflant. Les balles de plomb qui partent comme la foudre, n’auraient pas égalé en vitesse ces terribles projectiles.

Un livre, plus dur qu’une pierre de taille, frappa aux tempes Jusepe de Vargas, le frappant en même temps de terreur et d’effroi. Il poussa un cri, et s’adressant à un sonnet : « Ô toi, qui sors à toute vitesse d’une plume satirique, pourquoi n’arrêtes-tu pas ta course coupable ? » Et tel qu’un chien mis en fureur par les pierres qu’on lui lance, quitte celui qui les jette pour courir après elles, comme si les pierres étaient la cause de son tourment, avec les doigts de ses belles mains, il mit en pièces l’insolent sonnet qui menaçait le ciel et les étoiles. Et le dieu de Cyllène : « Foudre vivant, lui dit il, qui fais paraître une juste indignation, égale à ton courage extrême, saisis dans ta droite redoutée l’épée meurtrière et t’élance vaillant et hardi, de ce côté où presse le péril. »

En ce moment, fendant l’air comme un oiseau, arriva un livre de la grosseur d’un bréviaire, lancé par l’ennemi ; c’était un mélange de prose et de vers. L’extravagance des vers et de la prose, nous avertit que