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10 LE KORAN.  
  1. Certes, ceux qui croient, et ceux qui suivent la religion juive, et les chrétiens, et les sabéens, en un mot quiconque croit en Dieu et au jour dernier et qui aura fait le bien : tous ceux-là recevront une récompense de leur Seigneur ; la crainte ne descendra point sur eux, et ils ne seront point affligés[1].
  2. Souvenez-vous du jour où nous acceptâmes votre alliance et où nous élevâmes au-dessus de vos têtes le mont Sinaï[2], nous dîmes alors : Recevez avec fermeté les lois que nous vous donnons, et souvenez-vous de ce qu’elles contiennent. Peut-être craindrez-vous Dieu.
  3. Mais vous vous en êtes éloignés dans la suite, et, n’était la grâce de Dieu et sa miséricorde, vous auriez été du nombre des malheureux. Vous avez déjà su qui étaient ceux qui avaient violé le sabbat et à qui nous dîmes : Soyez changés en singes refoulés vers le rivage de la mer[3].

  1. On a voulu conclure des paroles de ce verset que les hommes de toute religion, pourvu qu’elle renferme ces trois choses, l’unité de Dieu, la vie future et la pratique des bonnes œuvres, peuvent être sauvés d’après le Koran. Quelques commentateurs embarrassés de cette latitude de sens, ont soutenu que Mahomet entendait par là que tout homme qui devient croyant (musulman) et qui pratique la vertu sera sauvé, n’importe la religion à laquelle il aura appartenu. Cette interprétation est vicieuse d’abord quant à la lettre, parce que les mots : ceux qui croient sont suivis de la conjonction et ; il y a donc disjonction entre les croyants (musulmans) et les juifs, chrétiens et sabéens ; elle est vicieuse quant au sens, parce qu’il était superflu, surtout au commencement de la mission, de dire que la religion dans laquelle on était n’empêchait point le salut. Quel que soit du reste, le véritable sens du verset qui nous occupe, le sentiment général des docteurs musulmans est qu’il a été abrogé par le chap. III, verset 79 et par d’autres passages du Koran où la croyance en Dieu en la vie future et en la mission de Mahomet, est regardée comme indispensable pour le salut. L’importance de ce passage nous a forcé de le traduire aussi littéralement que possible. Nous ferons observer en passant que les sabéens, dont il est question dans ce verset, étaient une secte chrétienne, et nullement les sabéens adorateurs des astres, par conséquent polythéistes, et comme tels, exclus virtuellement de toute indulgence supposée dans ce verset ; au lieu de sabéens, il vaudrait mieux dire sabéites. Comp. V, 73.
  2. Cette phrase n’est évidemment qu’une métaphore, qui ne choquerait dans aucune langue européenne ; cependant les commentateur prennent ces mots à la lettre, et disent que les Israélites se refusant obstinément à recevoir la loi, Dieu, pour les effrayer, arracha le mont Sinaï de ses racines, et le tint suspendu sur leurs têtes.
  3. Ceci doit se rapporter à la transgression du sabbat, commise par les Juifs de la ville Aïla, sur les bords de la mer Rouge, sous le règne de David. Une quantité infinie de poissons, disent les commentateurs, s’approchaient du rivage, et y restaient toute la journée du sabbat, comme pour tenter les habitants. Ceux-ci ne pouvant résister à la tentation, prenaient le poisson, malgré les avertissements des hommes pieux, rigides observateurs du sabbat. David, ajoute-t-on, maudit les transgresseurs et les fit métamorphoser en singes.