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d’abord le nom de rue du Champ-Fleuri. Un décret du 21 mars 1801 ayant ordonné de placer la bibliothèque nationale dans le palais du Louvre, la rue du Champ-Fleuri fut nommée alors rue de la Bibliothèque. Une partie de cette voie publique, du côté méridional, a été abattue pour faciliter la réunion du Louvre au château des Tuileries. — Une décision ministérielle du 2 thermidor an X, signée Chaptal, avait fixé la largeur de la rue de la Bibliothèque à 7 m. En vertu d’une ordonnance royale du 22 août 1840, cette largeur a été portée à 10 m. Les maisons nos 2, 10 et 16 sont alignées ; le retranchement à opérer sur le côté des numéros impairs varie de 4 m. 10 c. à 5 m. 70. c. — Conduite d’eau depuis la place de l’Oratoire jusqu’à la borne-fontaine. — Éclairage au gaz (compe Anglaise),


Bibliothèque Royale.

Située dans la rue de Richelieu, no  58. — 2e arrondissement, quartier Feydeau.

Cette admirable collection occupe à juste titre le premier rang parmi les grands dépôts littéraires de l’Europe.

Pour trouver l’origine de la Bibliothèque du Roi, il faut remonter au règne de Charles V. Saint Louis, avant cette époque, avait réuni quelques livres plus ou moins curieux, mais ce prince se plaisait à distribuer ces ouvrages aux seigneurs et aux savants de sa cour.

La bibliothèque du roi Jean ne se composait que de huit ou dix volumes. À la mort de Charles V, on comptait neuf cents manuscrits. Cette augmentation atteste tout l’intérêt que ce prince portait aux lettres. Ces richesses littéraires, confiées à Gilles Mallet, valet de chambre du roi, furent déposées au Louvre, dans une tour qui prit à cette occasion le nom de tour de la Librairie. Ces manuscrits occupaient trois salles. Des barreaux de fer protégeaient les fenêtres. Les lambris des murs étaient de bois d’Irlande ; la voûte lambrissée de bois de cyprès, était enrichie de sculptures en bas-reliefs. Ce sanctuaire réservé à la science était éclairé par trente petits chandeliers, au milice desquels brûlait une lampe d’argent. Cette bibliothèque, dont Gilles Mallet avait dressé l’inventaire, était estimée 2,323 livres 4 sols. Cette collection disparut pendant le séjour des Anglais à Paris. Le duc de Bedfort l’acheta 1,200 livres. Cette somme fut payée à l’entrepreneur du mausolée de Charles VI et d’Isabelle de Bavière.

Charles VII, qui avait un royaume à reconquérir, ne put songer à réparer cette perte. Mais bientôt la découverte de l’imprimerie vint favoriser les développements de la Bibliothèque Royale. Louis XI couvrit de sa protection tous ceux qui cherchaient à répandre dans son royaume les produits de cet art merveilleux ; savant lui-même et bon littérateur, il rassembla tous les volumes qui étaient enfouis dans les maisons royales. L’histoire nous fournit une preuve du désir qu’il avait d’augmenter les richesses littéraires de la France. Pierre Schæffer, allemand, l’un des inventeurs de l’art typographique, ou du moins l’un de ceux qui le perfectionnèrent, avait envoyé, de concert avec Conrad Hanequis, son associé, un nommé Herman de Stathoen vendre à Paris plusieurs ouvrages. Cet agent mourut peu de temps après son arrivée. Alors les officiers du roi, en vertu du droit d’aubaine, s’emparèrent des biens et de l’argent qu’avait laissés le défunt. Schæffer et son associé protestèrent contre cette spoliation. Louis accueillit favorablement leur réclamation, rendit l’argent et paya les livres qu’il garda pour sa bibliothèque. Dans les lettres-patentes du 21 avril 1475, rendues en faveur des deux associés, le roi s’exprime ainsi : « Ayant considération de la peine et labeur que les d. exposants ont pris pour le d. art et industrie de l’impression, et du profit et utilité qui en vient et peut en venir à toute la chose publique, tant pour l’augmentation de la science que autrement ; etc…, nous sommes libéralement condescendus à faire restituer au d. Conrad Hanequis la somme de deux mille quatre cent vingt-cinq écus et trois sous tournois, etc…»

Louis XII fit transporter au château de Blois les volumes que ses prédécesseurs avaient réunis au Louvre.

François Ier, prince élégant et de nobles manières, instruit et bien disant, créa en 1544 une bibliothèque à Fontainebleau, et l’augmenta plus tard de tous les livres que Louis XII avait déposés dans le château de Blois. La bibliothèque de Blois, dont l’inventaire fut fait alors, se composait d’environ 1,890 volumes, dont 109 imprimés et près de 40 manuscrits grecs, apportés de Naples par le célèbre Lascaris. François Ier enrichit encore la bibliothèque de Fontainebleau d’environ 60 manuscrits, que Jérôme Fondul avait achetés dans les pays étrangers. Jean de Pins, Georges d’Armagnac et Guillaume Pellicier, ambassadeurs de France à Rome et à Venise, achetèrent pour le compte du roi tous les livres grecs qu’ils purent trouver. Le catalogue dressé à cet effet constate l’acquisition de 260 volumes. Guillaume Postel, Pierre Gille et Juste Tenelle nous rapportèrent du Levant 400 manuscrits, et 40 environ de l’Orient. Les livres du connétable de Bourbon augmentèrent encore la collection de Fontainebleau.

Jusqu’à cette époque, un simple garde en titre avait été le seul administrateur de la bibliothèque de nos rois. François Ier donna au savant Guillaume Budé la place de bibliothécaire en chef, avec le titre de maître de la Bibliothèque du Roi. Parmi les successeurs de Guillaume Budé, on cite avec éloge Pierre Duchâtel, Mellin de Saint-Gelais et Pierre de Montdoré.

Les principales richesses de la Bibliothèque consistaient alors en manuscrits. Henri II, conseillé par le savant Raoul Spifame, ordonna, vers 1556, à tous les libraires, de fournir à chacune des bibliothèques royales, un exemplaire en vélin et relié de tous les ouvrages imprimés par privilège. Cette ordonnance ne fut pas exécutée rigoureusement.