aux yeux, et se parloient comme si c’eût été pour la
dernière fois. La duchesse recommandoit au roi
ses enfants et ses domestiques. Ce prince l’écoutoit
et s’attendrissoit sans pouvoir la rassurer. Ils prenoient
congé l’un de l’autre, et aussitôt ils se rappeloient,
s’embrassaient et ne pouvoient se séparer. »
Gabrielle vint loger chez Zamet ; c’était un Italien fort
riche, qui s’intéressait dans toutes sortes de spéculations.
Il s’était qualifié dans le contrat de mariage de
sa fille : Seigneur suzerain de dix-sept cent mille écus.
Son caractère plaisant, spirituel et enjoué l’avait rendu
agréable à Henri IV. La duchesse fut accueillie par
son hôte avec toutes sortes d’égards et de prévenances.
Se promenant dans le jardin de ce financier,
après avoir mangé un citron, Gabrielle se sentit tout à-coup
un feu dans le gosier, et des douleurs si aiguës
dans l’estomac, qu’elle s’écria « Qu’on m’ôte de cette
maison, je suis empoisonnée. » On la transporta dans
son hôtel du Doyenné. Son mal redoubla ; elle éprouva
des crises, des convulsions si terribles qu’on ne pouvait
regarder sans effroi cette tête si belle quelques
heures auparavant. Elle expira la veille de Pâques 1599,
vers les 7 heures du matin. On ouvrit son corps et
l’on trouva son enfant mort. Henri IV fit prendre
le deuil à toute la cour, le porta la première semaine
en violet et la seconde en noir. Zamet fut accusé de la
mort de Gabrielle ; il était sujet du duc de Florence, et
l’on avait déjà parlé du mariage de Henri IV avec
Marie de Médicis. « On empoisonna cette favorite, dit
un écrivain contemporain, parce que le roi étoit déterminé
à l’épouser, et vu les troubles qui en seroient
advenus, ce fut un service qu’on rendit à ce
prince et à l’État. » — « Cela peut être, observe
Saint-Foix, mais on conviendra que de pareils services
sont plus infâmes que ceux du bourreau. La plupart
des historiens, ajoute le même écrivain, n’attribuent
cette mort si frappante qu’aux effets d’une
grossesse malheureuse. »
Germain-l’Auxerrois (rue des Fossés-Saint-).
Elle a été construite sur une partie de l’emplacement des fossés que creusèrent les Normands vers 886, lorsqu’ils vinrent assiéger Paris. En 1300 le poète Guillot la désigne sous le nom du Fossé-Saint-Germain. Au XVe siècle, c’était la rue au Quens de Pontis (au comte de Ponthieu), puis celle de Béthisy ; enfin lorsqu’on ouvrit la rue du Roule, la partie comprise entre cette rue et celle de l’Arbre Sec prit le nom de rue des Fossés-Saint-Germain-l’Auxerrois. — Une décision ministérielle du 13 floréal an IX, signée Chaptal, avait fixé la moindre largeur de cette voie publique à 10 m. Conformément à une ordonnance royale du 23 juillet 1828, cette moindre largeur est portée à 12 m., et l’alignement nouveau est approuvé, savoir : pour le côté gauche, depuis la rue de la Monnaie jusqu’à la maison no 35 ; pour le côté droit jusqu’à la rue Jean Tison ; à l’égard du surplus, le tracé ministériel de l’an IX est maintenu. La maison no 25 est alignée. Celles nos 41 et 43 ne sont pas soumises à retranchement. Les propriétés nos 45, 47 ; 10, 12, 18, 24, 26, 28, 30, 32, 38, 40, 42 et 44, ne devront subir qu’un faible reculement. — Égout. — Conduite d’eau depuis la rue de la Monnaie jusqu’à la borne-fontaine, située près de l’impasse Sourdis. — Éclairage au gaz (compe Anglaise).
La maison no 14 faisait partie de l’hôtel habité par l’amiral de Coligny. Au temps de la Saint-Barthélemy, cette demeure portait le nom d’hôtel de Ponthieu et appartenait à messire Antoine Dubourg, chancelier de France. Cet hôtel fut acheté par le duc de Montbazon en 1617. Sophie Arnould y naquit en 1740, et une lettre de cette, femme d’esprit, publiée en 1776, nous apprend qu’elle a reçu le jour dans la chambre à coucher de l’amiral de Coligny, et que souvent elle pensa que cette circonstance était pour elle l’augure d’une certaine renommée.
Elle joignait à une figure gracieuse un son de voix ravissant et une grande sensibilité. Un jeune seigneur, épris de ses charmes, conçut le projet de la soustraire aux rigueurs du cloître auquel ses parents la destinaient. Le comte de Lauraguais, le même qui, sous le titre de duc a siégé à la chambre des pairs sous la Restauration, déguise son rang et sa fortune, et, sous le nom de Dorval, prend un logement dans l’hôtel. Il gagne en peu de temps le cœur de Sophie, qui, par un soir d’hiver, revêt des habits d’homme, à l’aide desquels elle sort de l’hôtel sans être reconnue. — C’est là encore qu’habitait en 1747, le célèbre Vanloo, de l’académie royale de peinture. — Cet hôtel a été successivement envahi par les nombreuses industries qui peuplent le quartier, et de son ancienne splendeur il n’a guère conservé que l’appartement de l’amiral, occupé en ce moment par un médecin de l’Hôtel-Dieu.
Germain-l’Auxerrois (rue des Prêtres-Saint-).
On l’appelait anciennement rue ou ruelle du Cloître ou ruelle par laquelle on va à l’église et y aboutissant. Elle doit sa dénomination actuelle aux prêtres de l’église Saint-Germain-l’Auxerrois qui y demeuraient. En 1702, la partie comprise entre les places des Trois-Maries et de l’École portait le nom de rue Saint-Germain-l’Auxerrois ; à cette époque cette partie fut réunie