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lèvres, sans que sa voix se fit entendre. Héli pensa donc qu’elle était ivre, 14et il lui dit : “Jusques à quand seras-tu dans l’ivresse ? Fais passer ton vin[1].” 15Anne répondit : “Non, mon seigneur je suis une femme affligée dans son cœur ; je n’ai bu ni vin ni boisson enivrante, mais j’épanchais mon âme devant Yahweh. 16Ne prends pas ta servante pour une femme de Bélial, car c’est dans l’excès de ma peine et de ma douleur que j’ai parlé jusqu’ici[2].” 17Héli reprit la parole et lui dit : “Va en paix, et que le Dieu d’Israël exauce la prière que tu lui as adressée !” 18Elle dit : “Que ta servante trouve grâce à tes yeux !” Et cette femme alla son chemin ; elle mangea, et son visage n’était plus le même. 19Ils se levèrent de bon matin et, s’étant prosternés devant Yahweh, ils s’en retournèrent et revinrent dans leur maison à Rama. 20Elcana connut Anne, sa femme, et Yahweh se souvint d’elle. Après le temps révolu, Anne ayant conçu, enfanta un fils, qu’elle nomma Samuel, “car, dit-elle, je l’ai demandé à Yahweh[3].”

2. Chap. i, 21 — ii, 11 : Consécration de Samuel à Dieu.Nouveau pèlerinage d’Elcana (i, 21-23). Pèlerinage d’Anne après que l’enfant fut sevré (i, 24-27) ; elle le consacre à Yahweh (i, 28). Cantique d’Anne : Sa joie reconnaissante (ii, 1) ; grandeur de Yahweh (ii, 2, 3a) ; ses attitudes avec les puissants et les humbles (ii, 3b-8a) ; il accable les méchants (ii, 8b-10a) ; perspectives messianiques (ii, 10b). Retour à Rama ; Samuel reste au temple (ii, 11).

21Son mari Elcana monta avec toute sa maison pour offrir à Yahweh le sacrifice annuel et pour accomplir son vœu. 22Mais Anne ne monta pas, et elle dit à son mari : “Quand l’enfant sera sevré, je le mènerai pour qu’il paraisse devant Yahweh et qu’il demeure là toujours.” 23Elcana, son mari, lui dit : “Fais ce qui te semblera bon, reste ici jusqu’à ce que tu l’aies sevré. Daigne seulement Yahweh accomplir sa parole !” Et la femme resta et allaita son fils, jusqu’à ce qu’elle le sevrât.

24Quand elle l’eut sevré, elle le fit monter avec elle, ayant pris trois taureaux, un épha de farine et une outre de vin, et elle le mena dans la maison de Yahweh à Silo ; l’enfant était encore tout jeune. 25Ils égorgèrent le taureau, et ils conduisirent l’enfant à Héli. 26Anne dit : “Pardon, mon seigneur. Aussi vrai que ton âme vit, mon seigneur, je suis cette femme qui me tenais ici près de toi pour prier Yahweh. 27C’est pour cet enfant que je priais, et Yahweh m’a accordé la demande que je lui avais faite. 28Moi aussi je le donne à Yahweh ; tous les jours de sa vie, il sera donné à Yahweh.” Et ils se prosternèrent là devant Yahweh[4].


Anne pria et dit[5]  :

Mon cœur tressaille de joie en Yahweh,
ma corne a été élevée par Yahweh,
ma bouche est ouverte sur mes ennemis,
car je me suis réjouie de ton secours.

2Nul n’est saint comme Yahweh,
car il n’y a pas d’autre Dieu que toi ;
il n’y a pas de rocher comme notre Dieu.
3Ne prononcez pas tant de paroles hautaines,
qu’un langage arrogant ne sorte pas de votre bouche.

Car Yahweh est un Dieu qui sait tout,
et les actions de l’homme ne subsistent pas[6].
4L’arc des puissants est brisé,
et les faibles ont la force pour ceinture.

  1. Fais passer, (litt. éloigne de toi) ton vin, en allant dormir. Les LXX mettent ces paroles dans la bouche du serviteur d’Héli, sans doute parce qu’elles leur paraissaient choquantes.
  2. Femme de Béliâl (Belial, sans profit), femme perverse, femme de rien.
  3. Après le temps révolu ; litt. au retour des jours, c.-à-d. de l’année. — Samuel c.-à-d. obtenu de Dieu.
  4. Je le donne, m. à m. je le fais accordé à Yahweh, comme s’il avait été demandé. Vulg. je le prête.
  5. L’analogie de ce cantique avec celui de la Vierge Marie (Luc, i) est frappante. Comp. vers. 1 à Luc, i, 46-48 ; vers. 2-3 à Luc, i, 49-50 : vers. 4-8 à Luc, i, 51-53 : vers. 9-10 à Luc, i. 54, 55.
  6. Les actions de l’homme ne subsistent pas. D’autres, s’appuyant sur les LXX : et il pèse les actions des hommes.