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Chap. XVIII, 15.
Chap. XIX, 3.
ÉVANGILE SELON S. LUC.

2. En Pérée : Jésus et les enfants (xviii, 15-17). Le jeune homme appelé à la perfection ; récompense des conseils évangéliques (18-30). Nouvelle annonce de la Passion (31-34).

15Des personnes lui apportaient aussi leurs petits enfants pour qu’il les touchât ; ce que voyant, ses disciples les réprimandèrent.[1] 16Mais Jésus appela ces enfants et dit : « Laissez les petits enfants venir à moi, et ne les empêchez pas ; car le royaume de Dieu est à ceux qui leur ressemblent. 17En vérité, je vous le dis, quiconque ne recevra pas le royaume de Dieu comme un petit enfant, n’y entrera point. »

18Alors un chef lui demanda : « Bon Maître, que dois-je faire pour obtenir la vie éternelle ? »[2] 19Jésus lui dit : « Pourquoi m’appelles-tu bon ? Il n’y a de bon que Dieu seul. 20Tu connais les commandements : Ne commets point l’adultère ; ne tue point ; ne dérobe point ; ne porte point de faux témoignage ; honore ton père et ta mère. » 21Il répondit : « J’ai observé tout cela depuis ma jeunesse. » 22Ayant entendu cette réponse, Jésus lui dit : « Une chose te manque encore : vends tout ce que tu as, distribue-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans le ciel ; puis viens, et suis-moi. » 23Mais lui, ayant entendu ces paroles, devint triste, parce qu’il était fort riche. 24Voyant qu’il était devenu triste, Jésus dit : « Qu’il est difficile à ceux qui possèdent la richesse d’entrer dans le royaume de Dieu ! 25Il est, en effet, plus aisé qu’un chameau passe par le trou d’une aiguille, qu’il ne l’est à un riche d’entrer dans le royaume de Dieu. » 26Ceux qui l’écoutaient dirent : « Qui peut donc être sauvé ? » 27Il répondit : « Ce qui est impossible aux hommes est possible à Dieu. »

28Pierre dit alors : »Voyez, nous avons tout quitté et vous avons suivi. » 29Il leur dit : « Je vous le dis, en vérité, nul n’aura quitté sa maison, ou ses parents, ou ses frères, ou son épouse, ou ses enfants, à cause du royaume de Dieu, 30sans qu’il ne reçoive beaucoup plus en ce temps même, et dans le siècle à venir la vie éternelle. »[3]

31Ensuite Jésus prit à part les Douze, et leur dit : « Voici que nous montons à Jérusalem, et que va s’accomplir tout ce que les prophètes ont écrit du Fils de l’homme. 32Il sera livré aux Gentils, et moqué, et injurié, et couvert de crachats ; 33et après l’avoir flagellé, on le mettra à mort et il ressuscitera le troisième jour. » 34Mais ils ne comprirent rien à cela ; c’était pour eux un langage caché, dont ils ne saisissaient pas le sens.

3. À Jéricho : Aveugle guéri (xviii, 35-43). Zachée (xix, 1-10). La parabole des mines (11-27).

35Comme Jésus approchait de Jéricho, il arriva qu’un aveugle était assis sur le bord du chemin, demandant l’aumône.[4] 36Entendant passer beaucoup de gens, il demanda ce que c’était. 37On lui dit : « C’est Jésus de Nazareth qui passe. » 38Aussitôt il s’écria : « Jésus, fils de David, ayez pitié de moi ! » 39Ceux qui marchaient devant le réprimandaient pour le faire taire ; mais il criait beaucoup plus fort : « Fils de David, ayez pitié de moi ! » 40Alors Jésus s’arrêtant, commanda qu’on le lui amenât, et quand l’aveugle se fut approché, il lui demanda : 41« Que veux-tu que je te fasse ? » Il dit : « Que je voie. » 42Et Jésus lui dit : « Vois ! ta foi t’a sauvé. » 43À l’instant il vit, et il le suivait en glorifiant Dieu. Et tout le peuple, voyant cela, donna louange à Dieu.

Jésus étant entré dans Jéricho, traversait la ville. 2Et voilà qu’un homme appelé Zachée, — c’était un chef de publicains et il était riche, —

3cherchait à voir qui était Jésus ; et il ne le pouvait
  1. 15. Matth. xix, 13 ; Marc, x, 13.
  2. 18. Un des chefs de synagogue ou des principaux de la ville.
  3. 30. Beaucoup plus, en S. Matthieu et en S. Marc : le centuple.
  4. 35. Jésus, en sortant de Jéricho, guérit deux aveugles, d’après S. Matthieu (xx, 34 sv.), tandis que S. Marc (x, 46 sv.) n’en mentionne qu’un, appelé Bartimée. S. Luc ne parle aussi que d’un aveugle guéri par Jésus aux approches de la ville. Plusieurs solutions ont été données de ces divergences. Maldonat, Comment. Matth. xx, 30.
    D’ailleurs, ces divergences mêmes deviennent une preuve de l’indépendance, au moins relative, des différents récits évangéliques, comme aussi du respect religieux avec lequel l’antiquité chrétienne nous a transmis leur texte primitif, malgré l’embarras que certaines nuances pouvaient causer aux interprètes.
    Il faut se rappeler la destination éminemment religieuse et morale des évangiles, et le caractère des synoptiques, qui sont avant tout le relevé d’une prédication de témoins dans laquelle l’important était de transmettre sûrement ce que le Christ avait dit ou fait, mais souvent sans préoccupation des menus détails de lieu et de temps, qui n’ont point de valeur appréciable à ce point de vue. Aussi arrive-t-il parfois, que leur manque de précision, le lien plutôt logique que réel qui préside à leur narration dans le groupement de certains faits, présentent un récit qui parait contradictoire dans les détails à ceux qui cherchent une précision minutieuse que les évangélistes n’ont pas prétendu mettre.