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LES ORIGINES DE LA VIE

(Suite. — Voy. p. 209, 241 et 342.)


LES ÊTRES INTERMÉDIAIRES ENTRE LES ANIMAUX ET LES VÉGÉTAUX.

Les Infusoires flagellifères sont les Monades des anciens auteurs. On en connaît aujourd’hui un grand nombre de formes qui pullulent dans toutes les parties du globe. Les unes sont pourvues d’un seul flagellum ou fouet vibratile, les autres en possèdent deux ; la plupart présentent une vésicule contractile que l’on voit battre comme un cœur, quoique plus lentement. C’est une petite poche transparente qui forme bosselure sur la surface du corps (fig. 2, n° 1) ; cette bosselure se gonfle lentement, puis son contenu est expulsé, la vésicule devient momentanément invisible ; elle ne tarde pourtant pas à réapparaître et le phénomène se reproduit tant que dure la vie de l’animal. La durée de chaque battement paraît suffisamment constante pour qu’on ait pu proposer d’en faire un caractère spécifique. Beaucoup de Rhizopodes et même un certain nombre de zoospores possèdent comme les Infusoires flagellifères une vésicule contractile. On ne saurait guère considérer cette vésicule comme un organe de circulation, c’est bien plutôt un appareil d’excrétion.

La forme et la couleur des lnfusoires flagellifères sont extrêmement variables. Les Phacus (fig. 1, n° 2) sont aplatis en forme de feuille, les Euglènes (fig. 1, n° 3) allongées en forme de bâtonnets, les Astasies (fig. 1, n° 1) sont ovoïdes et peuvent être considérées comme des cellules de Volvocinées qui vivent toujours indépendamment les unes des autres et ne s’associent pas en colonies comme chez les Stephanosphœra, les Gonium ou les Volvox proprement dits. Certaines espèces sont colorées en vert et l’on peut les considérer comme des végétaux unicellulaires, d’autant plus que les Astasies se revêtent, pendant un certain temps, d’une enveloppe de cellulose ; d’autres, comme l’Euglena sanguinea, l’Astasia hœmatodes (fig. 1, n° 1) présentent une couleur d’un rouge vif. Plusieurs organismes de ce groupe Contribuent à la coloration rouge que présente parfois la pluie ou la neige, coloration attribuée à du sang par le peuple effrayé. La Monas prodigiosa, également de couleur rouge, se développe assez fréquemment sur les substances amylacées ; on en a vu sur du pain, sur des hosties ; il n’en a pas fallu davantage pour faire croire que ce pain ou ces hosties laissaient suinter du sang ; vous pensez si les imaginations ont été mises en mouvement par ces phénomènes prétendus miraculeux.

D’autres lnfusoires flagellifères sont dépourvus de toute matière colorante. S’il est permis de rapprocher des algues ceux dont nous venons de parler, les Infnsoires flagellifères incolores pourraient être rapprochés des Champignons ; mais, d’autre part, rien ne saurait empêcher de les classer parmi les animaux, et nous verrons que, de fait, ils se rattachent très étroitement à certains éléments constitutifs des Éponges.

Quelques-uns de ces organismes sont remarquables par l’apparition à la base de leur flagellum d’une sorte de collerette membraneuse, figurant un entonnoir suivant l’axe duquel le flagellum serait disposé. C’est un des caractères du genre Salpingœca. Diverses Salpingœca sécrètent un étui membraneux, en forme d’urne dans lequel elles habitent, telle est la Salpingœca Clarkii, Butschli (fig. 2, n° 2). Assez souvent un certain nombre d’Infusoires s’associent pour former des colonies. Des cellules semblables à des Salpingœca s’accolent-elles au nombre de huit à douze, en ligne droite, elles constituent les Codonodesmus de Stein. Les Anthophysa (fig. 3, n° 3) et les Cephalothamnium (fig. 3, n° 2) forment de gros capitules sphériques à l’extrémité de tiges plus ou moins ramifiées et flexueuses, les Uvella (fig. 2, n° 4), qui sont colorées en vert et les Codosiga (fig. 2, n° 1), qui sont incolores, se disposent en bouquets au sommet d’un long pédoncule. Les Dinobryon (fig. 2, n° 3), dont chaque individu possède un étui qui lui est propre, forment des colonies, ramifiées, arborescentes, d’une grande élégance.

Plusieurs espèces forment des colonies relativement volumineuses et très remarquables, les unes pur la régularité de l’arrangement des individus qui les composent, les autres par l’importance que prennent chez elles les parties secondaires, sécrétées par les Infusoires pour se constituer un abri. Comme les Anthophysa et les Codosiga, les Poteriodendron (fig. 4, n° 4) sont pédonculés ; mais ici chaque individu a son pédoncule particulier ; c’est par une série de bifurcations successives que se forment ces colonies admirables par leur parfaite symétrie. Les pédoncules des Dendromonas (fig. 4. n° 1) sont disposés de manière à porter au même niveau tous les individus et à constituer ainsi des espèces de corymbes fort élégants. Une urne membraneuse, transparente, à peine visible, un pédoncule plus ou moins allongé, voilà les seules parties qui viennent compliquer les colonies que nous venons d’étudier : la cellule flagellifère en est toujours l’élément le plus volumineux.