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capillitium manque chez les Licea et les Cribraria. Dans tous les cas, c’est la masse muqueuse tout entière des Myxomycètes qui se transforme en organe de fructification. La croûte rugueuse qui forme, chez les Æthalium, la paroi externe de l’organe, n’est autre chose qu’une portion de cette masse dans laquelle se sont rassemblées toutes les substances solides étrangères que contenait le protoplasma au moment de la fructification. Cette sorte d’épuration est l’indication du début de la phase reproductrice.

Les spores de Myxomycètes mises dans l’humidité se gonflent, leur paroi éclate et leur protoplasme, devenu libre, manifeste aussi des mouvements amiboïdes ; peu à peu cependant sa forme se fixe, l’une de ses extrémités s’effile en un long cil mobile à l’aide duquel le véritable zoospore, ainsi constitué, peut nager dans le liquide ambiant. Ces zoospores se reproduisent un certain nombre de fois par division ; finalement un certain nombre d’entre eux, reprennent l’apparence amiboïde, se fusionnent et constituent de la sorte un jeune Myxomycète qui n’a plus qu’à grandir pour reproduire la masse protoplasmique dont nous avons parié tout d’abord.

Lorsque, dans cette longue série de phénomènes, la sécheresse intervient, les zoospores ou les jeunes Myxomycètes qui résultent de leur fusion s’entourent d’une membrane d’enveloppe, s’enkystent et attendent dans cet état le retour de l’humidité ; dans ces mêmes circonstances les masses protoplasmiques de taille déjà considérable se résolvent en une infinité de petits corps sphériques, enfermés chacun dans sa membrane et aptes à reproduire autant de nouveaux individus.

Dans tout ce que nous venons de dire, rien évidemment ne permet de conclure à la nature végétale des Myxomycètes : au contraire, leurs mouvements, leur mode d’alimentation tendraient à les faire considérer comme des animaux. Des botanistes éminents comme de Bary et Rostafinski ont soutenu, l’un en 1866, l’autre en 1873, que ces êtres étaient bien certainement des animaux ; mais d’autres naturalistes ont prouvé que le passage des Myxomycètes aux véritables Champignons se faisait d’une façon insensible. Suivant Famitzine et Woronine, les Myxomycètes passent aux Ceratium d’une part, aux Polypores de l’autre par le Ceratium hydnoides et le Polysticta reticulata. M. Maxime Cornu établit en outre leur passage aux Saproligniées, petits Champignons parasites des matières animales en décomposition, par l’intermédiaire des Chitridium, eux mêmes parasites des Saproligniées.

En présence de liens aussi multipliés, il est impossible de séparer les Myxomycètes des Champignons, il faut voir en eux la forme de ce groupe la plus rapprochée de l’état initial des organismes, de l’état non différencié, comme on dit dans l’École, correspondant à une époque du développement de la vie où il n’y avait encore ni végétaux, ni animaux, mais des êtres protoplasmiques ayant en eux la puissance de le devenir.

Remarquez que nous retrouvons chez les Myxomycètes, succédant l’une à l’autre, trois formes que nous avons déjà eu presque constamment l’occasion de signaler : 1° la forme amiboïde dans laquelle une masse protoplasmique dépourvue de toute membrane d’enveloppe se meut en modifiant sans cesse son contour, soit qu’elle produise de grêles et minces pseudopodes comme chez les Rhizopodes, soit qu’elle se découpe en lobes arrondis plus ou moins profonds comme chez les Amibes ; 2° la forme ovulaire dans laquelle la masse protoplasmique devient sphérique, s’entoure d’une membrane et subit, ainsi abritée, diverses modifications généralement en rapport avec les phénomènes de reproduction ; 3° 1a forme flagellée représentée par une petite masse ovoïde de protoplasme munie d’un long filament, constamment en vibration, qui sert d’organe locomoteur.

Ces deux dernières formes ont dans la plupart des êtres que nous venons d’étudier une plus courte durée que la première, tout au moins n’attirent-elles pas autant l’attention parce que les œufs sont immobiles, parce que les œufs et les zoospores sont de petite taille. La forme ovulaire, quelle que soit sa durée, ne peut d’ailleurs être considérée que comme transitoire, car elle implique une période de repos apparent qui, en réalité, est une période d’élaboration interne préparant, chez nos Protistes, le passage de la forme amiboïde à la forme flagellée.

Il n’en est pas de même de cette dernière qui se fixe à ce point que les zoologistes ont dû former une classe spéciale des Infusoires flagellés, qu’il vaudrait mieux appeler Infusoires flagellifères. Nous aborderons l’étude de ceux-ci dans notre prochain article.

Edmond Perrier,
Professeur au Muséum d’Histoire
naturelle de Paris.

— La suite prochainement. —