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LA NATURE.

durée exacte de l’année à un centième près ? Beaucoup de gens peut-être en douteront encore.H. Blerzy.


UN MONSTRE

Nous avons parlé récemment de ce monstre nouveau que M. Depaul à signalé à l’Académie de médecine, et qui consiste en une petite fille, à laquelle est soudée la partie inférieure du corps d’un autre enfant (voy. p. 94). Ce cas exceptionnel a été l’objet de discussions fort curieuses dans une des dernières séances de l’Académie du médecine. Nous croyons devoir reproduire ces débats intéressants, d’après la Gazette de médecine. C’est M. Hervieux qui donne lecture d’un rapport sur la monstruosité que M. Depaul a présentée à l’Académie. Il s’agit d’une petite fille de cinq à six ans qui porte accolée à la paroi abdominale la moitié postérieure d’un corps d’enfant.

M. Hervieux avait été charge par l’Académie d’examiner le sujet, au point de vue scientifique ; il vient communiquer les particularités que présente cette singulière anomalie. Dans le cas actuel, il ne s’agit pas, comme on l’a dit, d’une monstruosité par inclusion, mais d’un monstre auquel Geoffroy Saint-Hilaire a donné le nom de polyméliens, caractérisé par l’insertion sur un corps bien conformé d’un ou de plusieurs membres accessoires. La partie accessoire ne présente ici ni orifice anal ni organes génitaux ; les membres sont inégaux, les articulations ankylosées, et toutes ces parties n’ont que peu de vitalité et une sensibilité fort obscure. L’union entre ces deux corps se fait, par une soudure à base large, qui permet pourtant des mouvements assez étendus. Le squelette du bassin et des jambes n’est arrivé qu’à un certain degré de développement. Quant aux parties molles, elles ne contiennent ni muscles, ni tendons, ni aponévroses ; elles sont uniquement constituées par une masse graisseuse. Il est aussi plus que probable, que les viscères de l’abdomen font complètement défaut.

Au point de vue du pronostic, ces monstruosités sont parfaitement compatibles avec la vie ; pas de troubles dans les fonctions de la vie organique, et la reproduction s’effectue comme à l’ordinaire, sans que le produit de la conception présente aucune anomalie. Le seul inconvénient, c’est la gène que cause dans certains cas le développement exagéré de la partie accessoire. Aussi M. Hervieux conclut-il pour une opération qui débarrasserait l’enfant d’une infirmité fort gênante. Quant à la cause originelle de cette monstruosité, M. Hervieux, pour le cas actuel, se rattache à la théorie de l’arrêt de développement avec un double germe dont l’un s’est arrêté dans son évolution.

M. Larrey cite un cas de ce genre qu’il a montré il y a dix ans à l’Académie des sciences. C’était un homme qui portait une troisième jambe entre les deux autres ; il avait été présenté à la même Académie quelques jours après sa naissance par Geoffroy Saint-Hilaire.

À propos des monstruosités qu’on exhibe tous les jours, M. Larrey croit que l’Académie devrait le faire pour garantir le public des mystifications. M. Depaul pense que l’Académie ne doit le faire que si elle est consultée officiellement. M. Blot regrette que M. Hervieux ait oublié d’examiner l’abdomen du sujet principal, car, d’après un travail publié en 1863 par M. Depaul, on trouve souvent dans l’abdomen du corps principal quelque portion du sujet, accessoire. Il y aurait donc lieu d’examiner de nouveau l’enfant à ce point de vue, surtout si l’on veut faire une opération.


LES SOURCES DU NIL

(Suite et fin. — Voy. p. 88 et 103.)

Passant sous silence un certain nombre d’expéditions, sur lesquels les renseignements ne sont pas encore complets, nous parlerons du plus grand des voyageurs en Afrique, de Livingstone, à qui semble réservée la gloire d’expliquer le singulier régime hydrographique au milieu duquel se trouvent les sources du Nil. Sa longue pratique de l’Afrique, sa connaissance des langues de l’intérieur, son habitude des observations astronomiques en ont fait le plus habile et le plus ardent des explorateurs. D’abord missionnaire dans les contrées qui s’étendent entre la colonie du Cap et le Zambèse, il entreprit de 1833 à 1836 sa première expédition et traversa le premier l’Afrique, de la côte de Mozambique au Congo. Sa seconde course, pendant laquelle il reconnut le Zambèse inférieur et découvrit le Nyassa des Maravis, embrasse les années 1858 à 1861. Enfin depuis 1863 il s’est enfoncé dans l’intérieur du continent. Il se proposait cette fois la reconnaissance du pays entre le Nyassa des Maravis et le Tanganyika ; il voulait achever l’exploration de ce dernier lac, visiter enfin les contrées qui le bordent à l’ouest, ainsi que toute la région du nord jusqu’à l’équateur, et relier ainsi les explorations méridionales à celles qui ont été faites par la vallée du Nil. Après avoir essayé sans succès de remonter la Rovouma, Livingstone gagna les montagnes qui bordent, à l’est, le lac Maravi, dont il contourna l’extrémité méridionale. Mais, sur la rive opposée, une partie de son escorte effrayée l’abandonna et fit courir à Zanzibar le bruit de sa mort. Le voyageur continua cependant sa route et donna de ses nouvelles le 5 février 1867. On n’en eut plus que l’année suivante ; elles étaient datées de la ville de Cazembé ou plutôt de Loanda, le 14 décembre 1867. Nous allons résumer rapidement les renseignements très-importants et tout nouveaux qu’elles contenaient. Au nord du lac Maravi, court une vallée formée, au nord, par les collines d’Usango, au sud, par les monts de Koné. Dans cette vallée, qui