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N° 13 — 30 AOÛT 1873
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LA NATURE.

LES EXPLORATIONS AU SPITZBERG

(Suite et fin. — Voy. page 161.)

Noire tâche serait remplie d’une façon tout à fait imparfaite si nous ne donnions, à nos lecteurs, une idée des paysages de la côte septentrionale du Spitzberg, dont nous avons retracé précédemment les contours.

Nous reproduisons une vue remarquable due à l’éminent artiste suédois Chydenius, d’après le magnifique ouvrage que Nordenskiold a publié en 1861, sur ses premiers voyages. Le paysage que nous avons représenté, est la baie de Treurenberg, illustrée par le séjour que le capitaine Parry y fit en 1827. Elle n’est séparée de Mossell-Bay que par l’épaisseur du mont Hécla où vient d’avoir lieu l’hivernage de 1873 ; c’est le même district et en quelque sorte la même physionomie. À la gauche de notre gravure, on aperçoit un cimetière, sinistre rendez-vous des explorateurs, que les éléments n’ont pas respectés.

La baie de Treurenberg au Spitzberg, d’après Nordenskiold.

Les dimensions de Mossell-Bay sont beaucoup moindres que celles de Treurenberg-Bay, et le paysage ne peut y avoir la même majesté sauvage ; mais en regardant la carte que nous avons donnée précédemment (p. 162.), on peut s’assurer que Mossell-Bay possède un avantage sérieux. Ce havre en effet est efficacement abrité contre les vents du nord, qui sont dans ces hautes latitudes une des causes les plus énergiques de refroidissements. Malheureusement, cet avantage a été acheté par une disposition corrélative qui a coûté bien cher à l’expédition de Nordenskiold, car Mossel-Bay, comme on peut encore s’en assurer, n’est pas moins énergiquement protégée contre les vents du sud. Il en résulte que les brusques débâcles qui ont signalé à plusieurs reprises l’hivernage de 1872-1873, et qui ont permis aux pêcheurs réfugiés derrière le cap Gray de s’évader, n’ont point dégagé le Gladan et l’Onkel-Adam qui sont restés retenus malgré eux captifs dans les glaces, auxquelles cinq navires voisins, montés par de simples pêcheurs, ont échappé sans coup férir.

Le Polhem était le seul navire destiné à hiverner ; le Gladan, qui avait porté son charbon, et l’Onkel-Adam ses rennes et le lichen qui leur servait de fourrage, devaient regagner la Norwége à l’arrière-saison ; cette partie du programme eût été remplie si l’hiver n’avait fait invasion avec la rapidité d’un coup de foudre. Ayant été construit spécialement pour le service des postes du Sund, le Polhem possède toutes les qualités nécessaires à un navire destiné à naviguer au milieu des glaces tant qu’elles n’ont point acquis une énorme épaisseur. L’avant est assez solide et assez effilé pour rompre des blocs dont des vaisseaux ordinaires seraient embarrassés. Il est, de plus,

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