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quatrième runo

« Et j’ai détaché la boucle de ma poitrine, j’ai ôté le collier de perles de mon cou, le bandeau bleu de mes cheveux, le ruban rouge de ma tête ; et je les ai jetés à terre, afin que la terre en jouît à son gré ; je les ai dispersés dans le bois, pour que le bois les utilisât à son profit, et j’ai dit : « Ce n’est ni pour toi ni pour un autre que j’orne ma poitrine d’une boucle de métal, que je noue mes cheveux avec un ruban de soie. Les beaux vêtements ne me font point envie, ni les tranches de pain de froment. Je préfère me couvrir de vêtements étroits, me nourrir de pain dur, dans la maison de mon père, auprès de ma bonne mère ! »

La mère dit à son enfant : « Ne pleure point, ma fille, ne sois point triste, tendre fruit de ma jeunesse ! Mange du beurre salé pendant un an : tu deviendras plus grasse que toutes les autres jeunes filles[1] ; mange de la chair de porc pendant une seconde année : tu deviendras plus charmante que toutes les autres jeunes filles, mange des gâteaux de crème pendant une troisième année, et tu deviendras plus belle que toutes les autres jeunes filles.

« Va dans l’aitta[2] bâtie sur la colline, dans l’aitta richement garnie, et là, ouvre le meilleur coffre, lève son beau couvercle. Tu y trouveras six ceintures d’or, sept jupes bleues que Kuutar[3] a tissées, que Päivätär[4] a façonnées.

« Étant encore jeune fille, j’allai, un jour, cueillir des baies dans un bois, des fraises sur les montagnes. Alors, près d’un champ de bruyères, d’un bosquet au vert feuillage, j’entendis que Kuutar tissait, que Päivätär agitait sa navette.

« Je m’approchai d’elles, et je dis : « Donne, ô Kuutar, de tes parures d’or, donne, ô Päivätar, de tes parures

  1. Les paysans finnois apprécient singulièrement l’embonpoint et les formes saillantes chez les femmes.
  2. V. page 3, note 5.
  3. File de la lune.
  4. Fille du soleil.