« Et, maintenant, elle porte un enfant dans son sein, elle le porte avec angoisses et douleur, depuis sept mois, depuis huit mois, depuis presque dix mois. »
Quand le dixième mois fut arrivé, la jeune vierge se sentit en proie à d’horribles souffrances.
Elle pria sa mère de lui préparer un bain[1]. « Ô ma chère mère, prépare un endroit retiré, une chambre bien chauffée pour servir de refuge à la jeune fille, d’asile de douleur à la femme ! »
La mère lui dit : « Malheur à toi, ô prostituée de Hiisi ! À qui donc t’es-tu abandonnée ? Est-ce à un homme marié ou à un héros non marié[2] ? »
Marjatta, la belle enfant, répondit : « Je ne me suis abandonnée ni à un homme marié, ni à un héros non marié. Je suis allée sur la colline pour y cueillir des baies, pour y chercher les rouges myrtilles ; et j’en ai pris une avec ma langue, et elle s’est glissée dans ma gorge, elle est descendue dans mon sein ; c’est la baie qui m’a rendue féconde. »
Marjatta pria son père de lui préparer un bain. « Ô mon cher père, prépare-moi un endroit retiré, une chambre bien chauffée, pour que la faible fille puisse y trouver un soulagement à ses douleurs. »
Le père lui dit : « Fuis loin de moi, ô prostituée, fuis, ô femme perdue[3], dans la sombre caverne de l’ours ; là, tu mettras bas tes petits ! »
Marjatta, la belle enfant, répondit avec sagesse : « Je ne suis point une prostituée, je ne suis point une femme perdue ; je mettrai au monde un grand homme,
- ↑ Voir page 222, note 1.
- ↑
« Voi sinua Hiien huora !
Kenen oet makaelema,
Ootko miehen naimattoman,
Eli nainehen urohon ? » - ↑ Le texte dit : Tuulen lautta, radeau du vent, même signification que huora, prostituée. Cette expression vient sans doute de ce que la femme dont il s’agit est essentiellement volage et tourne à tous les vents.