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le kalevala

« Je l’ai fixé par les dents du côté de l’Orient, j’ai dirigé ses yeux vers le nord-ouest ; mais, je ne l’ai point hissé tout à fait à la cime de l’arbre, de peur qu’il ne fût secoué par la tempête, brisé par le souffle du printemps ; je ne l’ai point placé trop près de la terre, de peur qu’il ne fût découvert par les porcs, ravagé par les groins sordides. »

Et le vieux Wäinämöinen se disposa à chanter pour glorifier le soir, pour réjouir la fin du jour ; et il prit la parole et il dit : « Dressez, maintenant, la lumière[1], afin que je puisse chanter ! Oui, voici l’heure de chanter, ma langue est agitée du désir de moduler des chants. »

Et le vieux Wäinämöinen, le runoia éternel, se mit à chanter des chants de joie, à faire résonner le kantele ; il chanta pendant toute la durée du soir, et après avoir épuisé ses runot, il dit : « Ô Jumala, ô vrai créateur, fais que dès maintenant et toujours, on déploie la même allégresse, on manifeste les mêmes transports, aux noces du grand Otso, au festin solennel de la très-splendide fourrure !

« Ô Jumala, ô vrai créateur, fais que dès maintenant et toujours, on plante des signaux sur la route, on grave des marques dans les arbres, pour la race de notre héros, pour la foule de nos grands guerriers[2] !

« Ô Jumala, ô vrai créateur, fais que dès maintenant et toujours, la flûte de Tapio retentisse, fais que l’on entende la corne des bois, dans ces petites habitations, dans ces étroites demeures !

« Puissent mes vœux s’accomplir ! puisse le kantele résonner durant les jours, les accords de la joie éclater

  1. C’est-à-dire mettez la päret enflammée sur le chevalet. Voir page 90, note 1.
  2. Allusion aux signaux qui ont conduit Wäinämöinen jusqu’au repaire de l’ours. Il demande à Jumala la même faveur pour les autres guerriers de son pays.