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aussitôt un râteau de fer ; il l’arma de dents longues de cent brasses, d’un manche de cuivre long de cinq cents brasses.

Le vieux Wäinämöinen prit le râteau et se dirigea, par un très-court chemin, vers le rivage.

Là, deux bateaux tout appareillés s’étendaient sur des rouleaux garnis de cuivre : l’un était neuf, l’autre était vieux.

Le héros dit au bateau neuf : « Va, maintenant, ô bateau, dans la mer, cours, ô navire, sur les vagues, sans qu’il soit besoin de te pousser du bras, ou seulement de te toucher du pouce ! »

Le bateau s’élança dans la mer. Le vieux, l’imperturbable Wäinämöinen s’assit alors au gouvernail, et il se mit à labourer les vagues, il râtela les fleurs de nénuphars, les arbrisseaux et les branches, les joncs et les roseaux ; il fouilla tous les trous, il explora les bancs et les rochers. Mais, il ne retrouva point le kantele formé des os du brochet, il ne rencontra point la joie perdue à jamais[1], le mélodieux instrument disparu sans retour.

Le vieux, l’imperturbable Wäinämöinen reprit le chemin de sa demeure, triste, la tête basse, le bonnet incliné de côté[2], et il dit : « Non, on ne retrouvera plus la joie qui s’exhalait des dents du brochet, les mélodieux accords qui retentissaient des os du poisson[3]. »

Tandis qu’il traversait un bois, qu’il longeait une forêt, il entendit un bouleau qui pleurait, un arbre à l’écorce tachetée qui versait des larmes ; il s’en approcha et il lui dit : « Pourquoi pleures-tu, ô frais bouleau, pourquoi verses-tu des larmes, ô bel arbre, pourquoi te la-

  1. « Iki-mennyttä iloa. »

  2. Voir page 87, note 1.
  3. « Ei tuota enämpi olle
    « Hauin hampahan iloa,
    « Kalanluista luikutusta. »