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quarante-troisième runo

« Et puisque je me confie dans mon créateur, puisque je me place sous l’égide de mon Dieu, il saura bien chasser les vers de mes champs, les larves dévorantes de mes cultures, il saura bien les empêcher de ronger mes semences, d’abattre mes plantes, de détruire mes récoltes.

« Et toi, ô femme de Pohjola, enfouis, si tu veux, les calamités dans la pierre, les fléaux dans le rocher, les maladies dans la montagne[1] ; mais il t’est défendu de toucher à la lune, encore plus d’attenter au soleil !

« Déchaîne, à ton gré, les froids rigoureux, les vents glacés, fais tomber une pluie de fer, une grêle d’acier, mais, seulement, sur les champs que tu as labourés, sur les champs que tu as ensemencés, dans ton pays de Pohjola !

« Évoque l’ours du fond des bruyères, le chat sauvage du fond des bois, les ongles crochus du désert, les dents rares des forêts de sapin, mais, seulement, pour ravager, dans Pohjola, les pâturages fréquentés par les troupeaux de Pohjola ! »

La mère de famille de Pohjola dit : « Ainsi donc, ma puissance est désormais brisée, mon prestige est éteint, ma prospérité a roulé au fond de la mer, avec les débris du Sampo ! »

Et elle s’en alla, en pleurant, vers sa demeure, en se lamentant, jusqu’à Pohjola ; elle emporta, néanmoins, ce qu’elle put recueillir du Sampo, avec le doigt sans nom, mais c’était bien peu de chose : un fragment de couvercle et sa poignée. C’est pourquoi une triste clameur retentit dans Pohjola, une vie sans pain régna en Laponie.

Le vieux, l’imperturbable Wäinämöinen étant arrivé à

    « Jumalall’on ilman viitta,
    « Luojalla avaimet onnen,
    « Ei katehen kainalossa,
    « Vihan-suovan sormen päässä. »

  1. Voir page 76, notes 1 et 2.