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le kalevala

chargé d’une foule de branches. Le fils du vieillard l’abattit, le fendit en deux parties, et après l’avoir frotté avec le baume magique, il dit : « Si ce remède est bon, s’il peut s’appliquer avec efficacité sur les blessures, que le tremble reprenne sa forme première, qu’il devienne plus beau qu’il n’a jamais été ! »

Soudain, les deux parties séparées du tremble se rejoignirent et il devint plus beau, plus entier qu’il n’avait jamais été.

Le fils du vieillard expérimenta le baume sur les fentes des pierres, sur les crevasses des rochers. Les fentes des pierres se rejoignirent, les crevasses des rochers se comblèrent.

Alors, le fils du vieillard sortit de la forge et porta à son père le baume qu’il avait préparé. « Voilà le remède sûr, le remède infaillible ; avec lui, tu peux souder les pierres, tu peux unir ensemble tous les rochers. »

Le vieillard goûta le baume avec sa langue, avec sa bouche nue, et trouva qu’il était bon.

Et il en frotta le corps de Wäinämöinen, il en oignit sa plaie dans tous les sens, et il dit : « Je ne te touche point avec ma propre chair, mais avec la chair du Créateur ; je ne te traite point avec ma propre force, mais avec la force du Tout-Puissant ; je ne te parle point avec ma propre bouche, mais avec la bouche de Jumala. Oui, si ma bouche est agréable, plus agréable encore est la bouche de Jumala ; si ma main est belle, plus belle encore est la main du Créateur. »

Lorsque le baume fut étendu sur la blessure, Wäinämöinen fut presque saisi de vertige ; il chancela comme un homme ivre, il ne put trouver aucun repos.

Le vieillard se mit à conjurer les douleurs ; il chassa les horribles tourments jusque dans le sein de Kipu-mäki[1], jusqu’au sommet de Kipu-vuori[2], afin

  1. Pierre des maladies.
  2. Montagne des maladies. Les maladies sont enfermées dans ses