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trente-huitième runo

rinen répondit : « Ô ma chère belle-mère, ne me fais point de pareilles questions, ne m’interroge point sur la vie, sur l’état de ta fille, sur le séjour dans ma maison de ta bien-aimée. La mort l’a déjà engloutie ; un sort cruel l’a frappée ; ma jolie baie est dans le sein de la terre, ma douce et gracieuse femme, aux sourcils noirs, est sous le gazon. Je suis venu ici pour te demander ton autre fille, ta plus jeune fille ; oui, ô ma chère belle-mère, donne-moi ta seconde fille, à la place de mon ancienne épouse, à la place de sa sœur. »

Louhi, la mère de Pohjola, répondit : « J’ai mal agi, malheureuse que je suis ! j’ai fait une action injuste, lorsque je t’ai promis, lorsque je t’ai donné mon enfant, pour qu’elle s’éteignît dans l’éclat de sa jeunesse, pour qu’elle se fanât dans la fleur de sa beauté ; je l’ai comme jetée dans les dents du loup, dans la gueule hurlante de l’ours.

« Mais, je ne te donnerai point mon autre fille, je ne te la donnerai point, pour enlever ta suie, pour balayer les scories de ta forge ; j’aimerais mieux mille fois la précipiter dans la cataracte mugissante, dans le tourbillon écumeux, dans la bouche de la lotte de Manala, sous les dents du brochet de Tuoni[1]. »

Le forgeron Ilmarinen tordit la bouche, branla la tête, secoua sa noire chevelure[2] ; puis il entra dans la maison, et là, il éleva la voix et il dit : « Viens avec moi, ô jeune fille, viens prendre la place de ta sœur, de mon ancienne épouse, afin de préparer les gâteaux de miel, de brasser la bière ! »

Un enfant couché sur le plancher se mit à chanter : « Loin d’ici, hôte importun ! Loin d’ici, homme étranger !

  1. « Manalan matikan suahun,
    « Tuonen hauin hampahisin. »

    Voir page 100, note 4.

  2. « Siitä seppo Ilmarinen
    « Murti suuta, väänti päätä,
    « Murti mustoa haventa. »