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l’étable. Ainsi tu te vengeras du mépris de la femme, ainsi tu lui feras expier ses rires insolents et ses moqueries. »

Kullervo, fils de Kalervo, dit :

« Attends, attends, vile prostituée de Hiisi[1] ! Si je pleure le couteau de mon père, tu pleureras peut-être aussi, toi-même, les vaches que tu viendras traire ! »

Et il coupa une branche dans les jeunes arbrisseaux, une branche de genévrier ; et il chassa les jambes crochues au fond du marais, il dispersa les taureaux à travers les bois ; il en livra une moitié à la voracité des loups, l’autre moitié à la voracité des ours. Puis, il changea Pienikki en loup, Kyyttä en ours, et se forma ainsi un nouveau troupeau.

Le soleil s’inclinait à l’occident, le soir approchait, couronnant d’ombres la cime des pins, et précipitant l’heure de traire les vaches.

Kullervo, fils de Kalervo, le rude et misérable berger, se dirigea vers la maison d’Ilmarinen, avec son troupeau de loups, avec son troupeau d’ours ; et, pendant la route, il les instruisait de ce qu’ils devraient faire : « Vous vous jetterez sur ma maîtresse et vous lui dévorerez la cuisse, vous lui arracherez la moitié de la jambe, lorsqu’elle viendra pour vous voir, lorsqu’elle se baissera pour vous traire. »

Et il se fit une corne de berger avec l’os d’une vache, avec la corne d’un taureau, l’os de Tuomikki[2], la jambe de Kirjo[3] ; et il souffla avec force dans l’instrument ; et il en tira des sons joyeux, lorsqu’il ne fut plus qu’à trois pas, qu’à six pas de la colline sur laquelle était située la maison de son maître.

La femme d’Ilmarinen, la belle femme du forgeron, soupirait avec impatience, après le lait frais, après le

  1. Voir page 50, note 1.
  2. Nom de vache.
  3. Nom de vache.