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le kalevala

car je veux me rendre aux noces de Pohjola, au grand festin des fils de Lempo[1]. »

L’humble, le docile esclave s’empressa d’obéir ; il harnacha le cheval de bataille, le coursier flamboyant, et il l’attela au traîneau ; puis il revint, et il dit : « J’ai fait ce que je devais faire : le cheval est harnaché, le splendide étalon est attelé au traîneau. »

Ainsi, pour le joyeux Lemminkäinen, le moment du départ est proche. Mais il hésite encore ; une main le pousse, une autre le retient ; les nerfs de ses doigts se crispent douloureusement. Enfin, il domine son irrésolution, et, bravant toute crainte, il se met en route.

Cependant, la mère continua d’exhorter son fils, la vieille femme prodigua les conseils à son enfant, elle lui parla devant la porte, sous la poutre du seuil, elle lui parla près de l’endroit où l’on serre les ustensiles du ménage : « Ô mon cher fils, mon fils unique, mon seul appui, si tu assistes à un festin, bois seulement la première, la meilleure moitié de ta coupe, et laisse la seconde moitié, la moitié inférieure à ceux qui ne te valent pas ; les serpents rampent au fond de la coupe, les vers y fourmillent. »

La mère exhorta encore son fils, la vieille femme prodigua les conseils à son enfant, elle le suivit jusqu’au champ le plus éloigné, jusqu’au bord du dernier chemin : « Si tu assistes à un festin, ne prends que la moitié du banc, ne fais que la moitié d’un pas, et laisse l’autre moitié, la moitié la moins bonne à ceux qui ne te valent pas[2]. Ainsi, tu deviendras un homme, un héros propre au combat, et tu sauras gagner toutes tes causes, au milieu du camp des grands guerriers, du cercle des hommes braves. »

Lemminkäinen prit place dans son traîneau, il frappa

  1. Voir page 41, note 3.
  2. Manière de dire que Lemminkäinen doit déployer une noble fierté et prendre partout et toujours la première, la meilleure place.