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vingt-cinquième runo

« Elle est habile, notre bonne hôtesse, elle est habile, la maîtresse vigilante de la maison, à brasser la bière, à apprêter la boisson savoureuse avec la séve du malt, avec le malt délicieux, ce même malt qu’elle a remué, qu’elle a retourné, non avec un bâton ou une palette, mais avec ses mains, avec ses poings, dans l’étuve libre de fumée, sur les lits de bois bien nettoyés de la chambre de bain.

« Notre bonne hôtesse, la maîtresse vigilante de la maison, n’a jamais laissé les germes s’engluer, le malt s’agglomérer ; souvent, au contraire, elle visitait l’étuve, elle la visitait même au milieu de la nuit, et tout à fait seule, sans avoir peur des loups, sans craindre les bêtes sauvages des bois.

« Maintenant que j’ai célébré notre hôtesse, je célébrerai notre coryphée[1]. Qui a été désigné pour être coryphée, qui a été choisi pour conduire le cortége ? C’est le plus illustre du village qui a été désigné pour être coryphée, c’est le bonheur du village[2] qui a été choisi pour conduire le cortége.

« Notre coryphée porte une tunique d’étoffe étrangère qui lui serre la poitrine et lui ceint gracieusement la taille.

« Notre coryphée porte un surtout de vadmel, aux longs plis flottants et traînant jusqu’à terre.

« On n’aperçoit qu’un bout insignifiant du col de sa chemise ; elle est de fine toile, comme si elle avait été tissée par Kuutar[3], par la jeune fille ornée d’une fibule d’étain.

« Notre coryphée porte autour de la taille une ceinture semblable à une nuée légère, une ceinture tissue par la fille du soleil, aux doigts charmants, alors que le feu n’existait pas encore, que le feu était inconnu.

  1. En finnois Patvaskani, celui qui sert d’intermédiaire entre l’époux, l’épouse et la famille de celle-ci. Tout ce qui regarde le cérémonial de la noce est placé sous sa direction.
  2. C’est-à-dire celui qui fait le bonheur, la joie du village.
  3. Voir page 35, note 3.