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aller aux regrets et aux angoisses ! Tu n’as point été amenée dans un marais, ni sur les bords d’un ruisseau ; tu es venue d’un champ fertile dans un champ plus fertile encore, tu es venue d’une maison où la bière abondait dans une maison où la bière est encore plus abondante.

« Ô douce jeune fille, ô belle fiancée, je veux t’adresser une seule question : As-tu vu, en arrivant ici, de vastes amas de blé, des collines de grains à la haute cime ? Toutes ces richesses appartiennent à cette maison ; elles ont été semées et récoltées par ton fiancé.

« Ô jeune et gracieuse fille, je veux te donner un conseil : Puisque tu as su trouver le chemin de cette maison, sache aussi y demeurer. Il est honorable pour une femme de demeurer dans la maison de son époux, il est beau pour une belle-fille de vivre dans la maison de sa belle-mère ; les jattes de lait y sont confiées à ses soins, les pots de beurre y sont dans sa puissance.

« Oui, il est honorable pour toi de demeurer ici, il est beau pour la colombe d’y passer sa vie. Tu y trouveras dans la chambre de bain de vastes lits<[1], dans la chambre de famille de larges bancs ; l’hôte y vaut ton père, l’hôtesse ta mère, les fils y valent ton frère, les filles y valent ta sœur.

« Lorsque tu désireras, lorsque tu souhaiteras des poissons pêchés par ton père, des gélinottes prises par ton frère[2], ne les demande point à ton beau-frère ni à ton beau-père ; adresse-toi directement à ton époux, à celui qui t’a amenée dans cette maison ! Il n’est, dans les bois, aucun animal à quatre pieds, dans l’air aucun oiseau ailé, dans l’eau, aucun poisson armé de nageoires, que ton époux ne puisse captiver, que celui qui a su te charmer, qui t’a amenée dans cette maison, ne puisse te rapporter.

  1. Voir page 210, note 1.
  2. C’est-à-dire si tu désires les mêmes poissons, le même gibier que tu trouvais dans la maison paternelle.