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dix-neuvième runo

des jeunes garçons de Suomi<[1], des prétendants du pays. »

Un enfant couché sur le plancher, un petit garçon âgé de deux semaines dit : « Il est facile de cacher un cheval, de dérober aux regards un étalon orné d’une belle crinière, mais il est difficile de cacher une jeune fille, de dérober aux regards une vierge à la belle chevelure. Tu ferais bâtir un château de pierre au milieu des écueils de la mer, pour y garder tes jeunes filles, pour y élever tes colombes, que les jeunes filles ne pourraient y être gardées, que les vierges ne pourraient y être élevées, sans que ne réussissent à pénétrer jusqu’à elles les prétendants du pays, les jeunes garçons en foule, les hommes au casque superbe, les chevaux au sabot ferré[2]. »

Le vieux Wäinämöinen, triste et la tête basse, reprit la route de son pays et dit : « Malheur à moi, infortuné, malheur à moi qui n’ai point songé à me marier dans ma jeunesse, à chercher une épouse dans les meilleurs jours de ma vie ! Tout devrait être un sujet d’angoisses pour celui qui regrette de s’être marié de bonne heure, d’avoir eu des enfants tandis qu’il était jeune, de s’être fait une famille tandis qu’il était à la fleur de son âge. »

Puis, le vieux Wäinämöinen exhorta les hommes vieux à ne point rechercher les jeunes filles, à ne point briguer la main des belles vierges ; il les dissuada de nager par bravade, de ramer pour une gageure, de rivaliser avec les jeunes hommes, dans la poursuite d’une vierge.

  1. Voir page 155, note 2.
  2. Les runot finnoises introduisent souvent dans leurs récits des personnages parasites, tels que des enfants, des vieillards, etc., qui jouent le rôle d’interlocuteurs, et se mêlent à l’action quoique sans y prendre une part directe et influente. Ces personnages pourraient être comparés, ce semble, aux chœurs des tragédies grecques.