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était venue laver, et relevant avec les mains les plis de ses vêtements, elle se mit à courir ; elle arriva à la maison d’Ilmarinen et entra dans l’atelier du forgeron.

Le forgeron Ilmarinen, le batteur de fer éternel, était occupé à fabriquer un long siége de fer ; il le fabriquait avec du fer mêlé d’argent. Sa tête était couverte d’une aune de mâchefer, ses épaules d’une brasse de suie.

Annikki lui dit : « Ô forgeron Ilmarinen, mon frère, ô batteur de fer éternel, forge-moi une petite navette, forge-moi quelques jolis anneaux, deux ou trois paires de boucles d’oreille, cinq ou six chaînes pour ma ceinture, et je te dirai des choses vraies, je te découvrirai la vraie vérité ! »

Le forgeron Ilmarinen répondit : « Si tu m’apportes une bonne nouvelle, je te forgerai volontiers une navette et quelques jolis anneaux ; je te forgerai une fibule pour ta poitrine, je te fabriquerai une belle parure. Mais si, au contraire, ta nouvelle est mauvaise, je briserai toutes tes anciennes parures, je t’en dépouillerai et les jetterai dans le feu de ma forge. »

Annikki, la vierge célèbre, lui dit : « Ô forgeron Ilmarinen, songes-tu encore à prendre pour épouse celle dont tu as jadis demandé la main, celle que tu t’étais réservée pour compagne ?

« Tu bats le fer, tu forges sans cesse ; tu as passé tout l’été, tout l’hiver à ferrer ton cheval ; tu as consacré les jours et les nuits à te fabriquer un traîneau, un superbe traîneau, pour te rendre à Pohjola chercher une épouse. Et voici qu’un plus rusé, qu’un plus illustre que toi va te prévenir ; il va t’enlever ta propriété, il va s’emparer de ta bien-aimée, de celle après laquelle tu as soupiré pendant deux ans, de celle dont tu es le fiancé depuis trois ans. Wäinämöinen vogue sur la mer bleue, dans son bateau à la proue d’or, au gouvernail de cuivre ; il se dirige vers la sombre Pohjola, vers la nébuleuse Sariola[1]. »

  1. Voir page 56, note 2.