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Le nouveau Sampo se mit à moudre, le Sampo au splendide couvercle se mit à s’agiter ; il commença son travail au lever du jour : un coffre fut moulu pour être mangé, un autre coffre pour être vendu, un troisième coffre pour être conservé.

La mère de famille de Pohjola tressaillit de joie. Elle emporta le grand Sampo dans l’enceinte de sa demeure ; elle le cacha dans les entrailles d’un rocher de cuivre, à une profondeur de neuf brasses, sous neuf serrures ; elle enfonça une de ses racines dans la terre, l’autre dans l’eau, la troisième dans la colline sur laquelle était bâtie sa maison[1].

Alors, le forgeron Ilmarinen commença à réclamer la jeune vierge. « Maintenant, la jeune vierge m’appartient, car j’ai forgé le Sampo, le Sampo au splendide couvercle. »

La belle vierge de Pohja dit : « Qui donc ferait chanter les coucous, l’année prochaine, qui ferait gazouiller les oiseaux, l’été d’après, si la colombe devait s’en aller, si le fruit des entrailles de ma mère devait partir, si la rouge baie devait disparaître ? Les coucous fuiraient au loin, les oiseaux de la joie déserteraient les sommets de cette colline, les épaules de cette chaîne de montagnes.

« Non, quand même il n’en serait pas ainsi, je ne partirai pas, je n’abandonnerai pas ma vie de jeune fille ; je ne délaisserai point la tâche que je n’ai pas encore remplie, ni mes travaux pressants de l’été. Les baies des champs n’ont pas été cueillies, les rivages du golfe n’ont pas été chantés ; je ne me suis point promenée à travers les bois, je n’ai point folâtré à l’ombre des grands arbres. »

Le forgeron Ilmarinen, le batteur de fer éternel, fut saisi d’une grande tristesse. Son cœur était oppressé, sa

  1. V. page 60, n. 1.