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dixième runo

car il a prétendu qu’aussi longtemps que durerait ce monde, qu’aussi longtemps que la lune ferait briller sa lumière d’or, je ne reviendrais plus, avec des yeux vivants, dans les bois de Wäinölä, dans les landes de Kalevala. »

Et le vieux Wäinämöinen se mit à chanter, à exercer sa science. Il chanta, et soudain un sapin surgit de la terre, un sapin à la couronne fleurie, aux rameaux d’or. Sa tête monte jusqu’à travers les nuages, ses branches s’élèvent dans les airs et franchissent les hauteurs du ciel.

Le vieux Wäinämöinen chanta encore, le vieux Wäinämöinen exerça encore sa science, et la lune vint se poser dans la couronne du sapin, et Otawa sema ses étoiles sur ses branches.

Alors le vieux Wäinämöinen reprit sa course bruyante vers sa demeure chérie. Il a la tête penchée, le cœur triste, le bonnet de travers ; car, pour sauver sa vie, pour délivrer sa tête, il a promis d’amener le forgeron Ilmarinen, le batteur de fer éternel, dans la sombre Pohjola, dans la nébuleuse Sariola.

Déjà, son étalon s’est arrêté aux limites du nouveau champ d’Osmo. Il sort la tête de son beau traîneau, et entend résonner, du fond de la forge, le marteau du batteur de fer.

Le vieux, l’imperturbable Wäinämöinen se dirigea du côté du bruit. Ilmarinen était occupé à forger ; il dit au héros : « Ô vieux Wäinämöinen, où es-tu donc resté si longtemps ? Où as-tu passé ta longue absence ? »

Le vieux, l’imperturbable Wäinämöinen répondit :

« Je suis resté si longtemps, j’ai passé ma longue absence dans la sombre Pohjola, dans la nébuleuse Sariola. J’ai suivi, sur mes suksi[1], la trace des suksi, au milieu du pays des tietäjä[2]. »

  1. Sorte de longs patins ou raquettes, avec lesquels les Lapons et les Finnois glissent sur la neige, principalement en descendant les collines.
  2. V. page 26, note 1.