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le kalevala

« Mes joyeux coucous chantaient jadis matin et soir ; ils chantaient même au milieu du jour. Qui donc a brisé leur voix éclatante, qui a détruit leur belle voix ? Le chagrin a brisé leur voix éclatante, le désespoir a détruit leur belle voix. C’est pourquoi on ne les entend plus chanter, au coucher du soleil, pour me charmer aux heures du soir, pour me réjouir au lever de l’aurore.

« Comment pourrai-je encore supporter la vie, habiter dans ce monde, voyager à travers ces régions ? Si ma mère vivait encore, elle m’inspirerait, sans doute, ce que je dois faire, pour ne pas être brisé par le chagrin, pour ne pas succomber au désespoir, durant ces jours lamentables, durant ces angoisses pleines d’amertume. »

Soudain, la mère de Wäinämöinen s’éveilla de sa tombe ; elle lui répondit du sein des flots :

« Ta mère vit encore, ta nourrice n’est point engourdie par le sommeil de la mort. Elle peut te dire ce que tu dois faire pour ne pas être brisé par le chagrin, pour ne pas succomber au désespoir, durant ces jours lamentables, durant ces angoisses pleines d’amertume. Rends-toi dans les régions de Pohja. Là, tu trouveras des filles plus gracieuses, des jeunes filles mille fois plus belles, cinq, six fois plus svelles que les frêles créatures de Jouko[1], que les sordides enfants de Laponie.

« Oui, c’est là, ô mon fils, que tu dois chercher une épouse ; prends la meilleure des filles de Pohja, choisis une vierge, belle de visage, belle de corps, légère sur ses pieds, vive et alerte dans tous ses mouvements. »

  1. Jouko ou Joukola, pays de Joukahainen. V. page 47, note 1.