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comme le fond de la mer est couvert de ses eaux, afin que tous connaissent cette gloire. » [1]. Les Septante : « Malheur à celui qui bâtit une ville du sang des hommes et qui en prépare les matériaux dans les iniquités ! Est-ce que de telles œuvres viennent du Seigneur tout-puissant ? Et beaucoup de peuples sont tombés dans le feu, et des nations en grand nombre ont été resserrées à l’étroit, parce que la terre sera remplie, afin qu’elle connaisse la gloire du Seigneur qui la couvrira comme une eau qui couvrirait les mers. » Il n’y a doute pour personne, le discours prophétique, selon le sens littéral, est encore dirigé contre Nabuchodonosor : il le plaint de bâtir Babylone avec le sang des hommes, et d’en construire les murailles avec la ruine et la mort de plusieurs. Ce roi, pour avoir construit la ville avec le sang des hommes, entend les paroles menaçantes que le Seigneur prononce, ensuite, puisque le texte continue : « Ne sera-ce point le Dieu des armées qui fera ceci ? » c’est-à-dire, ce qui va être annoncé – « Tous les travaux des peuples seront consumés par le feu, et les efforts des nations seront vains ; » Babylone incendiée, les travaux et les efforts des peuples seront vains et de nul effet, et les peuples de la nation chaldéenne succomberont, parce que la terre sera remplie, afin qu’elle connaisse la gloire du Seigneur ; c’est-à-dire, après que Babylone aura été renversée, la puissance de la vertu de Dieu deviendra évidente pour tous, comme les eaux qui couvrent la mer ; la gloire du Seigneur remplira toute la terre, comme les eaux remplissent le lit et couvrent le fond de la mer. Voilà ce qui a trait au sens littéral.

D’autre part, il est manifeste que le diable, l’Antéchrist et la doctrine perverse des hérétiques bâtissent une nouvelle ville dans le sang des hommes, c’est-à-dire leur église, dans la perte de ceux qu’ils ont trompés, et qu’ils préparent leurs villes dans les iniquités, proférant l’iniquité contre Dieu, et portant leur front aussi haut qu’ils peuvent. Dès qu’ils agissent ainsi, il suit de là clairement que c’est d’après leurs seuls desseins qu’ils bâtissent leur ville dans le sang et qu’ils en préparent les matériaux dans les iniquités. Aussi le texte poursuit-il ainsi : « Sont-ce là des œuvres du Seigneur tout-puissant ? » une telle construction n’a rien de commun avec le Seigneur des armées, les Septante traduisant ici Sabaoth par tout-puissant. Et, en effet, beaucoup de peuples succomberont, et quoique des nations innombrables soient entraînées dans leur erreur, toutefois, ou ils tomberont dans le découragement, ce qui est plutôt le sens de ὀλιγοφύκησαν, ou certainement ils seront réduits à un petit nombre, qu’on ne pourra comparer à la multitude des enfants de l’Église. Après qu’ils auront succombé dans le feu, c’est-à-dire, ou bien après qu’ils auront été consumés par le feu du diable, leur maître, ou bien après qu’ils auront été embrasés du feu de Notre-Seigneur, dont il a dit lui-mème : « Je suis venu pour jeter le feu sur la terre, et tout mon désir est qu’elle brûle », [2], qu’ils auront

  1. Hab. 12, et seqq
  2. Luc. 12, 49