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pas là les discours que je tenais, quand j’étais encore dans mon pays ? C’est en prévision de cela que je voulais fuir a Tharsis ; car je sais que vous êtes bon et enclin au pardon, patient et plein de miséricorde, et vous repentant des maux dont vous menacez. Et maintenant, Seigneur mon maître, ôtez mon âme de mon corps, parce qu’il vaut mieux pour moi mourir que vivre. » Nous avons rendu par « je vous le demande », et les Septante ont traduit par « ô », le mot hébreu Anna ; c’est une interjection habituelle a celui qui supplie, et elle marque l’intention d’attendrir. Comme sa prière, et il dit que c’est avec juste raison qu’il a voulu fuir, accuse en quelque manière Dieu d’injustice, il tempère ses plaintes en leur donnant la couleur d’une supplique. N’est-ce point la, dit-il, ce que je disais, quand j’étais encore dans mon pays ? Je savais que c’est 14 ce quo vous feriez ; je savais que vous êtes miséricordieux, et je ne voulais pas vous annoncer comme sévère et cruel ; c’est, pour cela que je voulais fuir à Tharsis, vaquer à la contemplation, et, au milieu de la mer de ce monde, jouir du repos et du loisir. Je me suis éloigné de ma maison, j’ai quitté mon héritage, je suis sorti de votre sein, et je suis venu. Si je vous peignais miséricordieux, clément et, pardonnant le mal, nul ne ferait pénitence ; si je vous peignais sévère, et si je n’annonçais que le juge, je savais que c’était contraire à votre nature. Dans cette alternative, fuir que détourner de la pénitence par la douceur, ou vous peindre tel que vous n’êtes pas. Prenez donc, Seigneur, mon âme, parce que la mort vaut mieux pour moi que la vie ; prenez mon âme qui a été triste jusqu’à la mort ; prenez mon âme, je remets mon esprit entre vos mains, Luc. 21, 1, seqq. parce que la mort vaut mieux pour moi que la vie. Vivant, je n’ai pu sauver la seule nation d’Israël ; je mourrai, et le monde sera sauvé. Le sens littéral est évident, et il peut, quant à la personne du Prophète, s’entendre ainsi, comme je t’ai dit souvent, qu’il est attristé et veut mourir, de peur que la conversion de la multitude des nations n’amène la ruine éternelle d’Israël.

« Le Seigneur lui dit : Crois-tu que ta colère soit juste ? » Jon. 4, 4. Les Septante : « Les Septante : « Le Seigneur dit à Jonas : Avez-vous raison de vous affliger si vivement ? » Le mot hébreu Aralac peut se rendre par « êtes-vous irrité ? » ou par « êtes-vous affligé ? » L’une et l’autre interprétation convient, et au Prophète, et à Notre-Seigneur : ou il est irrité, de peur de paraître avoir menti à occasion des Nivites, ou il est attristé, parce qu’il comprend qu’Israël doit périr. Remarquez avec quel tact Dieu ne dit pas : Votre colère ou votre tristesse est injuste, pour ne pas ajouter l’affliction ses reproches ; ou encore : Votre colère ou votre