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de la côte qu’il avait ôtée à Adam. Admirez l’exactitude de l’Écriture ! Elle ne dit pas, Dieu forma, mais produisit, parce qu’il prit une portion d’une chair déjà formée, et qu’il ne fit que l’augmenter, Dieu produisit donc la femme, non par l’acte d’une création nouvelle, mais en ôtant à Adam une portion de chair, et produisant de cette faible portion un être complet en toutes ses parties. Combien donc est grande la puissance du Créateur qui, avec si, peu de matière, a formé les membres souples et élégants de la femme, et a produit cet être si parfait, qui est doué d’une exquise sensibilité et qui procure à l’homme une douce société et une grande consolation ! Car c’est pour la consolation de l’homme (lue la femme a été formée ; aussi l’Apôtre dit-il que l’homme n’a pas été créé pour la femme, niais la femme pour l’homme. (1Cor. 2,9)
Voyez donc comment toutes choses sont faites pour l’homme ! L’univers était créé, ainsi que les animaux qui devaient servir à sa nourriture, ou l’aider en ses travaux ; mais il lui manquait une compagne qui pût converser avec lui, et qui étant de la même nature, pût embellir son existence. C’est pourquoi Dieu prit une de ses côtes, et par un acte de sa suprême sagesse en forma un être doué de raison, en tout semblable à l’homme, et capable de lui venir en aide dans les besoins, comme dans les douceurs de la vie. Or c’est Dieu lui-même qui dans son infinie sagesse a ainsi disposé et arrangé toutes ces choses, et quoique notre esprit soit trop faible pour les comprendre ; nous ne laissons pas de les croire, parce que tout est soumis à sa volonté et à son commandement.
Et le Seigneur Dieu produit la femme de la côte qu’il avait ôtée à Adam, et il l’amena devant Adam. Comme la femme n’avait été formée que pour Adam, le Seigneur la lui amène, et semble lui dire : La création entière ne pouvait vous offrir une aide qui vous fût semblable, aussi vous avais-je promis une compagne digne de vous. J’acquitte aujourd’hui ma promesse en vous présentant ce nouvel être parfait et accompli. Le Seigneur amena donc la femme devant Adam, et Adam dit : Voilà maintenant l’os de mes os, et la chair de ma chair. Cette parole nous montre qu’Adam reçut alors de Dieu l’esprit de prophétie, de même qu’il en avait reçu le don admirable de la science. Ce fut en effet par suite de ce don qu’il imposa à chacune des espèces si nombreuses des animaux leur nom propre et véritable. Mais ici l’écrivain sacré a eu bien soin de nous avertir qu’Adam avait été plongé dans un profond assoupissement, en sorte qu’il n’avait eu aucune sensation de ce qui s’était passé en lui. Aussi, lorsqu’à la vue de la femme il se montre instruit de tout, nous ne pouvons douter qu’il n’ait reçu l’esprit prophétique, et qu’il n’ait parlé par l’inspiration du Saint-Esprit.
Adam ignorait humainement la création de la femme, et cependant dès que Dieu la lui amène, il dit : Voilà maintenant l’os de mes os, et la chair de ma chair. Un autre interprète, au lieu du mot, maintenant, écrit une fois ; comme si Adam eût déclaré que pour cette fois-ci seulement la femme était formée de cette manière, et que ce mode de génération ne se renouvellerait plus. C’est comme s’il eût dit : maintenant la femme a été formée de l’homme, mais dorénavant l’homme naîtra de la femme, ou plutôt de l’union des deux sexes. Car, dit l’Apôtre, l’homme n’a point été tiré de la femme, mais la femme a été tirée de l’homme ; et l’homme n’a pas été créé pour la femme, mais la femme l’a été pour l’homme. (1Cor. 2,8-9) Eh ! direz-vous en m’interrompant, ces paroles montrent que la femme est formée de l’homme. Attendez donc un peu, et admirez avec quelle exactitude s’exprime l’Apôtre. Cependant, continue-t-il, ni l’homme n’est point sans la femme, ni la femme sans l’homme (Id. 2), voulant dire que depuis la formation de la première femme, et l’homme et la femme naissent de la même manière, par l’union des sexes. Tel est le sens de cette parole qu’Adam dit de la femme : Voilà maintenant l’os de me os, et la chair de ma chair.
4. Mais voulez-vous mieux connaître encore la certitude de cette prophétie, et son éclatant accomplissement qui durera jusqu’à la fin du monde ? écoutez ces autres paroles d’Adam : Celle-ci s’appellera d’un nom pris du nom de l’homme, parce qu’elle a été tirée de l’homme. C’est pourquoi l’homme quittera son père et sa mère, et s’attachera à sa femme, et ils seront deux dans une même chair. Voyez-vous avec quel soin Adam lui-même nous explique sa pensée, et comme il pénètre l’avenir de son regard prophétique ? Celle-ci, dit-il, s’appellera d’un nom pris du nom de l’homme, parce qu’elle a été tirée de l’homme. Cette première parole nous rappelle que Dieu prit une des