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parmi vous avec les miracles. Aujourd’hui, afin que vous compreniez bien que Dieu s’est détourné de vous pour jamais, ces choses mêmes ont disparu pour faire place à l’esclavage, à la captivité, à une déchéance complète, et ce qu’il y a de pis, à l’abandon de Dieu.
4. Dieu a fait comme un maître, qui, après avoir fouetté maintes fois son esclave sans le corriger, le dépouille de ses vêtements et l’abandonne à lui-même, nu, vagabond, dénué de tout, mendiant, partout proscrit. Tel n’était pas auparavant votre sort, vous aviez des prophètes jusqu’en Égypte, jusque dans Babylone et dans le désert ; en Égypte, Moïse ; à Babylone, Daniel et Ézéchiel ; en Égypte encore, Jérémie. Les miracles succédaient aux miracles et la gloire de votre nation s’augmentait ; les vôtres, en captivité, étaient plus grands que des rois. Mais tout cela est passé, il ne reste qu’un châtiment pire que les précédents, non seulement par sa durée, mais encore par l’abandon complet où vous êtes laissés. Pourquoi donc, dites-moi, étiez-vous si favorisés de la Providence lorsque vous étiez plus coupables, et êtes-vous plus sévèrement châtiés, aujourd’hui que vous avez déployé, s’il faut vous en croire, votre zèle pour la loi ? En prétendant cela, vous accusez Dieu d’injustice ; vous le représentez honorant les coupables et humiliant les hommes vertueux. Si vous avez fait une bonne action comme vous le prétendez, si votre victime n’était qu’un imposteur, Dieu qui est juste aurait dû vous récompenser et non vous punir ; s’il vous punit, il est clair que vous êtes plus coupables que jamais. Mais si vous n’êtes plus impies comme autrefois, si vous n’égorgez plus d’enfants, quelle est donc cette faute pire que vous expiez par un pire châtiment ? N’est-il pas évident gaie le crucifiement est comme le couronnement de vos crimes ? Voilà ce qui vous a perdus plus que l’idolâtrie, que l’érection du veau d’or, que les égorgements d’enfants. Car ce n’est pas la même chose d’égorger son enfant ou de crucifier son maître. Aussi, lorsque vous immoliez vos fils, Dieu vous a été clément, mais du jour où vous avez fait périr le Fils de Dieu, votre maître, votre crime a été irrémissible. Combien d’années s’est-il écoulé depuis la sortie d’Égypte jusqu’à la venue du Christ ? Environ quinze cents années et plus. Comment se fait-il donc, que durant tout ce temps, le Seigneur ait supporté vos fautes, et qu’il vous rejette aujourd’hui, aujourd’hui que le moment serait venu de vous couronner, quel qu’ait pu être jusqu’ici le nombre de vos crimes ? Jamais vous n’avez rien pu faire de plus méritoire que d’immoler un imposteur. De plus, vous paraissez aujourd’hui observer fidèlement le sabbat, vous n’adorez plus les idoles, vous vous piquez d’observer toutes les prescriptions de la loi. Et c’est quand votre vie est plus pure, quand vous avez fait de plus la bonne œuvre que vous dites, c’est alors que vous êtes en butte à toutes les infortunes ! Quelle pire folie, quelle plus abominable démence que celle qui vous porte à blasphémer Dieu pour vous justifier ? Si votre conduite vis-à-vis du Christ était un titre pour vous, loin d’être un péché plus détestable que tous les autres, pourquoi cette sévérité à l’égard des justes, cette indulgence pour les pécheurs ? Un homme quelque peu intelligent, Dieu à plus forte raison, ne consentirait jamais à se conduire de la sorte. Mais que répondent-ils à cela ? Nous avons été dispersés, pour devenir les instituteurs de l’univers. Niaiserie, sottise, que cette réponse. Avant de devenir le maître des autres, il faut commencer par se bien conduire soi-même ; c’est alors seulement qu’on peut être chargé d’une telle mission ; et tel fut le cas des prophètes, des apôtres. Mais les juifs égarés eux-mêmes et chargés de toutes les iniquités, comment auraient-ils pu être chargés d’enseigner ? Considérons donc quelle était leur vie, dès avant cette époque. Nous verrons qu’ils étaient plus farouches que des bêtes fauves. Ce n’étaient que parricides, infanticides, idolâtres, ravisseurs du bien d’autrui ; les prophéties l’attestent en maint endroit. Jérémie disait pour faire voir votre luxure : « Ils sont devenus comme des chevaux ardents pour les femelles ; chacun hennit en voyant la femme du prochain. » (Jer. 5,8) Quelle abominable impureté ! Ce n’étaient plus des hommes, ces êtres (lui s’accouplaient avec les femmes d’autrui ; aussi nomme-t-il leur fureur hennissement. Ce n’est pas seulement la fornication, c’est encore l’adultère qu’il leur reproche, et une promiscuité comparable à celle des brutes. Un autre prophète dit : « Le père et le fils se sont approchés de la même femme. » (Amo. 2,7) Est-ce donc pour cela, dis-moi, que Dieu vous a institués nos