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Le mensonge », suivant un autre. « Il a ouvert une fosse et l’a creusée, et il tombera dans la fosse qu’il a faite. » Ailleurs on dit : « Dans la perdition qu’il a opérée. » Il a dit que Dieu s’est préparé aux châtiments ; il a dit qu’il déchaîne les supplices. Ainsi il a ramené l’auditeur à la sagesse, par la vue de la colère d’en haut suspendue sur sa tête. Il l’instruit maintenant au moyen de la réalité même, en montrant que le vice lui-même est un premier châtiment. C’est ce que Paul fait voir aussi en disant : « Et recevant en eux la rétribution due à leur erreur. » (Rom. 1,27) En effet, rien n’est plus propre à corriger la plupart des hommes grossiers, que l’exemple du malheur. Le Psalmiste leur met donc aussi cette image sous les yeux. Ainsi fait le Christ lui-même : Après avoir parlé longuement de la géhenne, il nous fait voir ceux qui y sont précipités. Par exemple le riche, dans l’histoire de Lazare ; les vierges folles, l’homme qui avait enfoui le talent, et de même, en ce monde, ceux qui furent ensevelis sous les ruines de la tour, ceux dont Pilage mêla le sang aux sacrifices. De même encore Pierre, après un long discours sur l’enfer, frappa surtout ses auditeurs, quand il en vint à leur montrer ceux qui avaient été punis, et à étaler sous leurs yeux le supplice d’Ananie et de Saphire, et Paul fit la même chose à l’égard du magicien. Il s’y prend d’une autre manière pour produire le même effet, lorsqu’il parle comme il suit de ceux qui périrent dans le désert. « Je ne veux pas que vous ignoriez que tous nos pères étaient sous la nue, et que tous furent baptisés en Moïse, mangèrent l’aliment spirituel et burent le breuvage spirituel ; mais Dieu ne se complut pas dans la plupart d’entre eux : ils périrent et tombèrent. » (1Cor. 10, 1-5) Il parle de l’avenir, de l’enfer, du châtiment, du supplice : à l’appui de sa démonstration, il invoque le passé, et produit sous nos yeux les supplices eux-mêmes, les victimes des serpents et de l’exterminateur. Ici même, David fait la même chose, soit qu’il parle d’Achitophel ou d’Absalon. Quelques-uns croient qu’il s’agit d’Achitophel. En effet, il ne convenait pas au même homme de dire : « Épargnez mon enfant Absalon », et quand il l’eut perdu, « qui me donnera la mort à ta place ? » (2Sa. 18,5-33), et de parler comme il fait ici. Mais les premières paroles lui étaient dictées par la nature ; celles-ci, par l’inspiration de l’Esprit. D’ailleurs, qu’il ait eu en vue Absalon ou Achitophel, examinons ses paroles : je me soucie peu des personnages.
13. Qu’apprenons-nous par là ? Il nous fait voir que celui qui creuse une fosse pour le prochain, y tombera : et que pareil aux femmes enceintes, dont la grossesse est un tourment, l’artisan d’une perfidie, avant qu’il ait réussi à nuire, est lui-même en proie aux tourments, à la douleur, à une douleur vive et poignante. Aussi voulant représenter ce que cette douleur a d’affreux, il emploie le terme de grossesse. C’est le mot dont se sert l’Écriture quand elle veut dépeindre une douleur insupportable. – De là cette phrase : « Des grossesses se sont emparées des habitants de Philistim (Ex. 15,4) : » entendez, la crainte, le tremblement, la peine, la douleur. Paul de même : « Lorsqu’ils diront, Paix et sécurité, alors même viendra sur eux une ruine soudaine, comme est le mal de la grossesse pour une femme enceinte. » (1Thes. 5,3) Par là il indique à la fois la violence intolérable du mal, et son irruption subite. Ezéchias dit aussi : « Que les douleurs de la grossesse sont venues pour la femme enceinte, mais qu’elle n’a pas la force d’accoucher (Is. 37,3) », marquant par cette expression une crainte et une souffrance intolérables. Ainsi fait le prophète en cet endroit. – Un homme fût-il un millier de fois scélérat, il ne réussira jamais à corrompre le tribunal de sa conscience ; c’est un juge naturel que Dieu lui-même a institué au fond de nos cœurs. Quelque résistance que nous lui opposions, il est toujours là pour nous dénoncer, nous punir, nous accuser ; et il n’est aucun de ceux qui vivent dans l’iniquité qui ne souffre une douleur inexprimable, soit en méditant le crime, soit en exécutant son dessein. Quoi de plus scélérat qu’Achab ? Néanmoins quand il eut convoité la vigne, rappelez-vous quelle fut sa douleur. – Ce roi, ce souverain absolu, que personne n’osait contredire, incapable de supporter les accusations de sa conscience, rentre chez lui triste, la tête baissée, confus, un sombre nuage sur le front, portant sur son visage le témoignage accusateur de sa conscience, et ne pouvant voiler la douleur de son âme. – C’est en cet état du moins que sa femme le surprit. – Le traître Judas, l’homme qui s’était porté à un tel attentat, ne pouvant supporter la douleur que lui causait le jugement de sa conscience, se pendit et finit ainsi