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encore qui est la loi ; que plus on a reçu d’instruction, plus on subira une peine rigoureuse. La même différence s’observe eu ce qui concerne les dignités : c’est ce que montre clairement le sacrifice. La victime était la même pour racheter le péché du peuple tout entier que pour expier celui du prêtre seul. On voit par là que, plus le rang est élevé, plus le châtiment est rigoureux. La femme du commun, qui s’était prostituée, périssait. La fille du prêtre était brûlée. Il y a encore une autre cause d’allégement ou d’aggravation : pour la peine de deux pécheurs, par exemple, l’un est châtié en ce monde, l’autre vit au sein des plaisirs. Celui-ci sera puni plus rigoureusement là-haut, celui-là avec plus de douceur, s’il n’est pas absolument déchargé de sa dette. Le Christ indique cela, lorsqu’il nous montre Abraham disant au riche : « Tu as reçu tes biens, celui-ci ses maux, et maintenant celui-ci est consolé, et toi, tu souffres. » (Lc. 16,25) Cet homme, à cause de ses souffrances, avait été relevé de tout châtiment, d’autres ne le sont qu’en partie, et leur punition est seulement allégée. On trouvera de même que le degré d’intelligence met une différence entre les châtiments, si l’on fait attention à cette parole : « Le serviteur, qui sait la volonté de son maître et ne l’accomplit pas, recevra des coups nombreux ; celui qui ne la connaît pas et ne l’accomplit pas, recevra peu. » (Id. 12,47-48) On relèverait bien d’autres raisons qui modifient le châtiment, la miséricorde, la charité. Prenons, par exemple, le premier homme. Eve pécha, Adam pécha, et leur faute fut pareille. Tous deux avaient mangé du fruit de l’arbre, mais ils ne furent point également punis. Caïn commit un meurtre, Lamech aussi ; mais l’un obtint miséricorde, l’autre fut châtié. Quelqu’un avait ramassé du bois le jour du sabbat, il fut puni inexorablement. David avait été homicide, adultère, et il fut traité charitablement. Appliquons-nous à cette recherche, cela vaut mieux que de donner son attention aux propos frivoles de la place publique. Ici trouver n’est pas le seul avantage, chercher sans trouver est encore un profit. Car la difficulté même nous donnera de l’occupation, et réclamera tout notre temps.
Pourquoi donc (je reviens à notre sujet), lorsque tous les Juifs avaient contribué à l’érection du veau d’or, les uns furent-ils punis, les autres, non ? C’est que les uns se repentirent et allèrent jusqu’à oublier la nature, lorsqu’ils égorgèrent leurs proches par piété ; les autres persévérèrent dans le crime. Le péché était égal, ce qui le suivit ne fut point pareil des deux côtés. Et pourquoi la peine infligée à, Adam et Eve ne fut-elle point la même pour un même péché ? Parce que ce n’était point la même chose d’être trompé par une femme ou par un serpent. Écoutez comment Paul entend la tromperie : « Adam ne fut pas trompé ; mais a sa femme trompée tomba dans le péché. » (1Tim. 2,14) Et pourquoi celui qui avait ramassé le bois n’obtint-il pas d’indulgence ? Parce qu’il y avait une grande iniquité à transgresser le précepte dès le début, et qu’il fallait inspirer une vive crainte aux autres. La même chose arriva pour Saphire et pour Ananie. En conséquence, lorsqu’il nous arrive à nous-mêmes de pécher, examinons si nous sommes dignes de miséricorde, si nous avons fait quelque chose pour obtenir compassion, si nous nous sommes repentis, améliorés, corrigés. En effet, le salut accordé au repentir est un salut dû à la miséricorde. C’est par là que David lui-même demande à être sauvé, à force de larmes, de gémissements. « Je laverai », dit-il, « chaque nuit ma couche, je mouillerai mon lit de mes larmes. » (Ps. 6,7) Mes larmes, c’est-à-dire ma componction. « Mes os ont été troublés » (Id. 3), « et mon âme a été dans un grand trouble. » (Id. 4) Il n’en vient pas tout de suite à son objet, il allègue la fragilité de sa nature en disant : « Ayez pitié de moi, Seigneur, parce que je suis faible. » Il parle ainsi, pour montrer que cela ne suffit pas ; si cela suffisait, nous serions tous sauvés par là ; car nous sommes tous des hommes.
3. Mais, à vrai dire, s’il faut presser le sens de ses paroles, ce n’est pas là peut-être ce qu’il veut exprimer. Il fait plutôt allusion à la faiblesse qui résulte des tentations, et il s’en fait justement un titre pour obtenir miséricorde et clémence. Du moins, il y fait allusion dans la suite en disant : « J’ai vieilli parmi tous mes ennemis. » (Id. 8) En effet, la tribulation endurée avec gratitude, a le don d’attirer sur nous de grandes grâces et de nous rendre Dieu propice. Ce sont donc ces grâces qu’il me paraît avoir en vue, lorsqu’il dit : « Guérissez-moi, Seigneur, parce que mes os ont été troublés, et que mon âme a été dans un grand trouble. » Il ne dit pas : pardonnez-moi, ni faites-moi rémission, mais bien : « Guérissez-