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courte parole ; par les flatteries des mots ; ce qui la prouve, c’est le zèle qui considère l’intérêt du prochain, qui relève celui qui a fait une chute ; qui tend la main à celui qui est par terre, sans plus penser à son propre salut ; qui recherche, avant son propre bien, le bien d’autrui. Voilà la vraie charité : car celui qui a la charité, ne regarde pas son intérêt propre ; il considère d’abord l’intérêt du prochain, et, par l’intérêt d’autrui, il assure son propre intérêt. (1Cor. 13, 5) Et moi-même, maintenant, que fais-je ? Ce n’est pas pour moi que je prolonge ces longs discours, c’est pour vous. Donc vous, à votre tour, ne les écoutez pas seulement pour vous-mêmes, mais pour les autres, à qui vous devez de les instruire ; car c’est le bon agencement des membres qui entretient le corps de l’Église. De même qu’un membre qui retiendrait pour lui toute la nourriture, sans rien communiquer aux membres voisins, se ferait du tort à lui-même, et ruinerait le reste du corps : par exemple, si l’estomac tirait toute la nourriture à lui seul, le reste du corps se dessécherait par la faim, et l’estomac se ruinerait lui-même par le dérèglement de son appétit ; si au contraire, se contentant de la part qui lui suffit, il envoie aux autres membres ce qui doit leur revenir, il s’entretient lui-même en bonne santé, et avec lui tout le reste du corps : Eh bien ! de même pour vous maintenant ; si, après avoir écouté nos paroles, vos gardez tout pour vous, sans rien communiquer à un autre, vous faites du tort à cet autre, et vous vous ruinez vous-mêmes ; vous vous attirez les maladies les plus graves ; vous cultivez en vous la lâcheté et l’envie ; car, c’est ou par malice, ou par envie, ou par lâcheté, que nous ne partageons pas avec les autres ; de quelque nature que soit ce mal, il suffit pour perdre celui qui en est atteint. Si au contraire vous communiquez abondamment la nourriture aux autres, vous vous faites du bien à vous-mêmes et aux autres ; mais en voilà assez sur ce sujet.
3. Ce qu’il faut maintenant, c’est reprendre la suite de nos dernières réflexions. Quelles étaient donc ces réflexions ? Nous recherchions, au sujet des noms Saul et Paul, pourquoi on dit tantôt Saul et tantôt Paul, et delà nous, avons fait une longue digression sur certains noms propres.. Puisque nous voilà débarqués, il ne nous paraît pas convenable de négliger l’approvisionnement que nous pouvons faire en ce nouveau pays. Encore que ce soit le nom de Paul qui nous ait fourni l’occasion d’entreprendre cette étude, il ne manque pas d’autres noms que nous puissions explorer avec profit. Les marchands, qui traversent les mers, et s’en vont, pour quelques menues denrées, vers des parages lointains, arrivent parfois dans une petite ville, où ils voient en abondance des objets tout différents qui leur conviennent, et, outre les marchandises pour l’achat desquelles ils ont quitté leur pays, ils font des emplettes beaucoup plus considérables que celles qu’ils avaient projetées. Si on leur en faisait un reproche, ils diraient : nous avons fait un long voyage, essuyé mille tempêtes, affronté mille dangers, franchi les mers ; qui nous empêche de donner de l’extension à notre commerce ? Nous pouvons, certes, nous excuser à leur manière. – Nous faisions des recherches sur les noms de Paul et nous avons trouvé en même temps comme des magasins d’autres noms ; ainsi Pierre s’appelait d’abord Simon, et les fils de Zébédée, Jacques et Jean, se nommaient les fils du tonnerre. Nous avons trouvé, dans l’Ancien Testament, Abraham appelé auparavant Abram, et Jacob nommé Israël, et Sarra au lieu de Sara ; nous avons trouvé, en outre, d’autres personnages dont les noms sont demeurés tels qu’ils les reçurent dès le commencement ; ainsi Jean-Baptiste, Isaac et Adam. Donc, il serait absurde, et de la dernière négligence, quand nous avons dans les mains un si grand trésor, de le jeter. Car voilà la raison de ce long discours ; et, comme nous avons parlé dernièrement de ceux qui ont gardé leurs premiers noms, nous parlerons aujourd’hui de ceux qui ont eu deux noms, comme, par exemple, Abraham. Adam a toujours porté le même nom ; Isaac n’en a pas reçu d’autre ; depuis le commencement jusqu’à la fin, Isaac. Mais le père d’Isaac s’appelait d’abord Abram, plus tard seulement, Abraham. En effet, Dieu lui dit ; Vous ne vous appellerez plus Abram, mais Abraham. (Gen. 17,5) Son premier nom, c’était Abram ; ce nom n’est pas grec, il n’appartient pas à notre langue ; c’est un nom hébreu. Que signifie-t-il donc ? Un passant. Aram, en syrien, signifie au-delà, outre, ce que savent bien, ceux qui connaissent cette langue. Il y a une grande affinité entre le Syrien et l’Hébreu, mais, dites-vous, pourquoi l’a-t-on appelé, passant ? La Judée, c’est-à-dire toute la Palestine, depuis l’Égypte jusqu’à l’Euphrate est en face de la Babylonie,