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dans une église ; qui n’avait jamais entendu la parole divine ; qui enfin, n’avait aucune idée de ce que pouvait être le royaume, des cieux, le Christ lui dit : Aujourd’hui, vous serez avec moi, dans le paradis. Le Christ s’est servi de ce mot connu, familier, de paradis, pour exprimer le royaume des cieux ; c’est de ce royaume que le Christ entend lui parler. J’y consens. Eh bien ! donc, disent les contradicteurs, il, est entré dans le royaume des cieux. Qui le prouve ? les paroles prononcées : Aujourd’hui, vous serez avec moi, dans le paradis. Si cette solution paraît violente, nous en apporterons une autre plus claire. Quelle est-elle ? Le Christ a dit  : Celui qui ne croit pas au Fils, est déjà condamné. (Jn. 3,18) Quoi donc ? est déjà condamné ; mais il n’y a encore ni résurrection, ni châtiment, ni supplice. Comment donc est-il déjà condamné ? par son péché. Autre parole : Celui qui croit au Fils, dit le Christ, est déjà passé de la mort à la vie. (Jn. 5,24) Il ne dit pas, passera, mais est déjà passé. Et, ici encore, c’est, pour l’un, la conséquence de sa foi, pour l’autre, la conséquence de son péché. Donc, de même que l’un est déjà condamné ; quoiqu’il n’ait pas encore été condamné, que l’autre soit déjà passé à la vie, quoiqu’il n’y soit pas encore passé ; que, pour l’un, c’est l’effet de sa foi, pour l’autre l’effet de son péché ; de même que Dieu parle, comme si les événements étaient accomplis, d’événements qui ne sont pas encore accomplis ; de même parlait le Christ, quand il s’adressait au larron. Les médecins voient un malade désespéré, il est perdu, disent-ils, il est mort, quoique le malade soit encore vivant ; mais, de même que ce malade, parce qu’il n’y a plus d’espoir de salut, est appelé, par les médecins, un homme mort, de même le, larron, parce qu’il avait échappé à toutes les chances de retomber dans la perdition, est entré dans le ciel. Du même genre sont les paroles qu’Adam entendit : Le jour que vous mangerez du fruit de cet arbre, vous mourrez. (Gen. 2,17) Quoi donc ? Est-il donc mort ce jour même ? Nullement. Il a vécu depuis plus de neuf cents ans. Pourquoi donc Dieu lui a-t-il dit : Ce jour même vous mourrez ? De droit, non de fait. C’est ainsi que le larron est entré dans le ciel. Écoutez ce que dit Paul, proclamant que personne n’a encore reçu la rétribution des biens. Il parlait des prophètes et des hommes justes, et il ajouta ces paroles : Tous ces saints sont morts dans la foi, n’ayant point reçu les biens que Dieu leur avait promis ; mais les voyant, et comme les saluant de loin ; Dieu ayant voulu, par une faveur particulière qu’il nous a faite, qu’ils ne reçussent qu’avec nous, l’accomplissement de leur bonheur. (Héb. 11,13, 40) Imprimez-en vous ces paroles, conservez-les dans votre mémoire, instruisez ceux qui ne les ont pas entendue : dans l’église, sur la place publique, à la maison, qu’elles soient le sujet des méditations de chacun de vous ; car, il n’est rien de plus doux que d’entendre la divine parole. Écoutez ce que dit le prophète : Que tes paroles sont douces à ma gorge ! elles le sont plus que le rayon de miel pour ma bouche. (Ps. 118,103) Ce rayon de miel, servez-le, le soir, sur votre table, pour la remplir tout entière du plaisir qui vient de l’Esprit. Ne voyez-vous pas que les hommes, opulents font venir à la fin du repas, des joueurs de lyre et des joueurs de flûte ? Ils font de leur maison, un théâtre ; vous, au contraire, faites de votre maison le ciel. Ce qui vous sera fâche, sans changer les murailles ; sans déranger les fondations ; appelez à votre table Celui qui commande au plus haut des cieux. Dieu ne rougit pas d’assister à de tels festins ; car c’est là que règnent la doctrine spirituelle et la tempérance et la gravité, et la douceur. Là où le mari, la femme et les enfants vivent dans la concorde, enchaînés tous ensemble par les liens de l’affection et de la vertu, là réside aussi le Christ ; il ne recherche pas les lambris dorés, les colonnes resplendissantes, les beaux marbres, mais la beauté de l’âme, la grâce des pensées, une table couverte des fruits abondants de la justice et de l’aumône. À l’aspect d’un pareil service, il lui tarde de prendre sa part du festin ; il s’assied à la table ; c’est lui-même qui l’a dit : J’ai eu faim et vous m’avez donné, à manger. (Mt. 25,35) Aussi, quand vous avez écouté le pauvre, dont le cri est monté jusqu’à vous, quand vous avez donné à l’indigent, une part quelconque des mets de votre table, c’est le Seigneur que vous avez invité, en invitant son serviteur ; et votre table vous l’avez aussitôt comblée de toutes les bénédictions ; en offrant vos prémices, vous avez saisi l’occasion la plus favorable d’attirer sur vous la plénitude de tous les biens. Que le Dieu de paix, qui donne le pain à celui qui ! e mange, et la semence au semeur, multiplie