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ensuite la différence : Car nous avons été condamnés, par le jugement de Dieu, pour un seul, au lieu que nous sommes justifiés par la grâce, après un grand nombre de péchés. (Id. 16) Ce passage est un peu obscur ; une explication est nécessaire : Par le jugement, cela veut dire, la peine, le supplice, la mort ; pour un seul, c’est-à-dire, pour un seul péché, puisque c’est un seul péché qui a introduit un si grand mal ; mais la grâce n’a pas effacé ce péché seul, elle en a supprimé un grand nombre d’autres. C’est pourquoi Paul nous dit : Au lieu que nous sommes justifiés par la grâce après plusieurs péchés. C’est ainsi que Jean-Baptiste s’écriait : Voici l’Agneau de Dieu, non pas, qui enlève le péché d’Adam, mais : qui enlève les péchés du monde. (Jn. 1,29) Voyez-vous qu’il ne faut pas mesurer la grâce au péché ? Comprenez-vous que notre arbre nous a donné des biens plais considérables, que né l’étaient, les maux introduits au premier jour ?
4. Je vous ai adressé ces paroles, pour que vous ne croyiez pas avoir à vous, plaindre, de vos premiers parents. Le démon a chassé Adam du Paradis ; le Christ a introduit le larron dans le ciel. Et voyez la différence : le démon a chassé, du paradis, un homme qui n’était souillé d’aucun péché ; sa désobéissance fut sa seule tache ; le Christ e introduit, dans le paradis, le larron, qui portait le fardeau de péchés sans nombre. Mais, devons-nous admirer uniquement ce fait, qu’il a introduit le larron dans le paradis ? N’y a-t-il plus rien d’admirable encore ? On peut dire un prodige encore plus grand du Christ. non seulement, il a introduit le larron, mais il l’a introduit avant le monde entier, avant les apôtres, afin que nul,'après lui, ne pût désespérer d’y entrer, abandonner toute : espérance de, salut, quand on verrait ce criminel ; qui était souillé de tant de forfaits, devenu un habitant de la cour céleste. Mais, examinons ; est-ce que le larron lui a montré ses travaux, ses bonnes œuvres, des fruits de vertu ? personne ne saurait le dire ; un petit mot, rien qu’un acte de foi, et, devançant les apôtres, il a bondi dans le paradis ; c’est afin de vous faire comprendre, que ce n’est pas tant sa vertu, que la bonté du Seigneur, qui a tout opéré. Car enfin, qu’a dit le larron ? qu’a-t-il fait ? Est-ce qu’il a jeûné ? est-ce qu’il a pleuré ? est-ce qu’il s’est affligé ? A-t-il manifesté son repentir ? Nullement ; mais sur la croix même ; à peine eût-il, parlé, qu’il avait obtenu son salut. Voyez la rapidité de la croix ; dans le ciel ; de la condamnation, aie salut. Or, quelles sont ces paroles, qui eurent tant de puissance, qui procurèrent, à cet homme, des biens si précieux ? Souvenez-vous de moi, dit-il, dans votre royaume. (Luc. 23, 42) Qu’est-ce à dire ? Il s’est borné à demander le bonheur, il n’a rien mérité par ses actions ; mais le Christ, connaissant son cœur, ne s’est pas arrêté a ses paroles, il n’a considéré que la disposition de son âme. Ceux qui avaient reçu les enseignements des prophètes, qui avaient vu, les signes, contemplé les miracles, ceux-là disaient du Christ : Il est possédé dit démon, il séduit le peuple. (Mt. 11,18) Mais le larron, qui n’avait pas entendu les prophètes, qui n’avait pas vu les prodiges, qui ne l’avait vu que pendu à la croix, ne fait pas attention à son ignominie ; malgré son abaissement, il voit sa, divinité ; Souvenez-vous de moi, dit-il, dans votre royaume. Chose incroyable ! Tu vois une croix`; et tu parles de royaume ? Que vois-tu donc là qui ressemble à un royaume ? Un homme crucifié, souffleté, raillé, accusé, couvert de crachats, battu de verges ; ce sont là des marques de la royauté ? réponds-moi. Comprenez-vous, que ce larron a regardé le Christ avec les yeux de la foi, sans s’occuper de l’apparence ? Aussi Dieu, à son tour, ne s’est pas occupé de ce que pesaient ces paroles si minces ; mais, comme le larron avait vu dans sa divinité, Dieu, de même, a vu dans son cœur, et il lui a dit : Aujourd’hui, vous serez avec moi dans le paradis. (Luc. 23, 43)
Ici, attention, car voici une question qui n’est pas indifférente. Les Manichéens, ces chiens stupides et enragés, portent la modestie sur leur figure, ils recèlent au fond de leur cœur la ragé des chiens ; sous la peau de la brebis, se cache le loup. Ne vous tenez pas à l’apparence ; fouillez le dedans, mettez, le monstre à découvert ; donc, ce sont eux qui saisissent, ici, l’occasion. Le Christ a dit : En vérité, en vérité, je vous le dis, aujourd’