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appliquerons la même observation, et aux esclaves, et à ceux qui subissent la domination des puissances ; les premières, c’est le péché qui les a introduites ; mais les hommes qui sont venus après, ont assuré la domination de ces puissances, par les fautes qu’ils ont commises. Je puis d’ailleurs me servir d’une autre justification, c’est qu’un grand nombre d’hommes, en retournant à la vertu, se sont affranchis de la domination. Et d’abord, s’il vous paraît à propos, parlons des femmes, afin de vous montrer, comment le bienheureux Paul, après leur avoir mis des liens, prend soin lui-même de rendre ces liens plus lâches : Si une femme, dit-il, a un mari du nombre des infidèles, et qu’il consente à demeurer avec elle, qu’elle ne se sépare point d’avec lui. (1Cor. 7,13) Pourquoi ? Car que savez-vous, ô femme, si vous ne sauverez point votre mari  ? (Id. 16) Et comment, me dira-t-on, la femme pourra-t-elle sauver son mari ? par ses enseignements, ses instructions, ses discours sur la religion. Mais vous disiez hier, bienheureux Paul : Je ne permets pas à la femme d’enseigner. (1Tim. 2,12) Comment donc se fait-il que vous l’employiez pour faire la leçon à son mari ? Je ne suis pas ici en contradiction avec moi-même, je suis, au contraire, en parfait accord. Écoutez, je vous en prie, comprenez pourquoi il la fait descendre de la chaire, et pourquoi il l’y fait remonter ; vous apprendrez ainsi quelle est la sagesse de Paul : C’est à l’homme à enseigner, dit-il. Pourquoi ? parce qu’il n’a pas été séduit. (1Tim. 2,14) En effet, dit-il, Adam n’a point été séduit. Que la femme écoute pour s’instruire, dit-il. Pourquoi ? parce qu’elle a été séduite. En effet ; la femme ayant été séduite est tombée dans la prévarication ; mais ici, nous voyons le contraire ; le mari, d’une part ; étant infidèle, d’autre part, la femme fidèle, que la femme enseigne, dit-il. Pourquoi ? c’est qu’elle n’a pas été séduite, puisqu’elle est fidèle. Donc, il faut que l’homme s’instruise ; parce qu’il a été séduit, puisqu’il est infidèle. Ce ne sont plus les mêmes qui enseignent ; par conséquent que ce ne soient plus les mêmes qui commandent. Voyez-vous, comme il fait voir, partout, que la servitude n’est pas une conséquence de la nature, mais de l’erreur et du péché ? Au commencement, l’erreur appartint à la femme, la sujétion a suivi l’erreur ; ensuite l’erreur a saisi l’homme et la sujétion s’est eu même temps que l’erreur, attachée à lui ; et, de même qu’au commencement, l’Écriture a confié le salut de la femme à l’homme, parce qu’il n’a pas été séduit, vous vous tournerez vers votre mari, et il vous dominera (Gen. 3,16) ; de même, ici, attendu que c’est une femme fidèle qui a un mari infidèle, le salut de l’homme est confié à la femme, par ces paroles : Car que savez-vous, ô femme, si vous ne sauverez point votre mari ? Est-il possible de démontrer plus clairement, que la servitude n’est pas une suite de la nature, mais du péché ? Nous pouvons appliquer aux esclaves les mêmes réflexions : Avez-vous été appelé esclave ? peu doit vous importer. (1Cor. 7,21) Voyez-vous comme il montre ici que la servitude n’est qu’un mot, quand la vertu l’accompagne ? Mais si vous pouvez devenir libre, faites plutôt un bon usage de la servitude, c’est-à-dire, demeurez plutôt dans la servitude. Pourquoi ? Car celui qui étant esclave, est appelé au service du Seigneur, devient affranchi du Seigneur. (Id. 22) Comprenez-vous que la servitude n’est qu’un mot, tandis que la liberté est réelle ? Maintenant pourquoi permet-il de rester esclave ? Pour vous faire comprendre l’excellence de la liberté ; car, de même qu’au lieu d’éteindre la fournaise où l’on avait jeté les trois jeunes hommes, il était beaucoup plus admirable de les y conserver intacts et sans atteinte, ainsi, au lieu de détruire la servitude, la conserver, montrer la liberté subsistant avec elle, voilà ce qui est plein de grandeur et digne de toute admiration. De là, ces paroles : Quand même vous pourriez devenir libre, faites plutôt usage de la servitude, c’est-à-dire, demeurez esclave, car vous possédez la plus vraie liberté.
2. Voulez-vous voir ces réflexions se confirmer, en ce qui concerne les puissances ? Il y eut un roi, Nabuchodonosor, qui embrasa une fournaise des feux les plus ardents, et fit amener trois jeunes hommes, bien jeunes, privés de tout secours, des captifs, des exilés. Or, que leur dit-il ? Est-il vrai, Sidrach, Misach, et Abdénago, que vous n’honorez point mes dieux et que vous n’adorez point la statue d’or que j’ai dressée ? (Dan. 3,14) Eh bien ! que répondirent-ils ? Voyez comme la vertu a rendu ces captifs plus rois que le roi lui-même, et a grandi, exalté leur fierté. En effet, ils n’avaient pas l’air de parler au roi, mais, comme s’ils eussent adressé la parole à quelque inférieur, ils tirent une réponse pleine de liberté :