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nous une haine implacable. Aussi avons-nous besoin d’une grande vigilance, afin de pouvoir triompher de ses artifices et mépriser ses coups. Et nous ne remporterons la victoire que si nous savons, par une conduite irréprochable, nous attirer le secours de Dieu. Or qu’est-ce qu’une conduite irréprochable ? C’est aine vie pure. C’est là la base et le fondement de la vertu : celui qui l’établit d’une façon inébranlable, surmontera facilement tous les obstacles ; un tel homme ne se laissera dompter ni par le désir des richesses, ni par l’amour de la gloire, ni par l’envie, ni par aucune autre passion. Et pourquoi ? Je vais le dire. Lorsqu’un homme a la conscience pure, et exempte de toute tache, le Maître de l’univers peut habiter dans son cœur. Car Jésus a dit : Bienheureux ceux qui ont le cœur pur, parce qu’ils verront Dieu ! Lorsque quelqu’un mérite que Dieu établisse sa demeure en lui, il vivra dans la suite comme s’il était simplement revêtu d’un corps et il montrera un souverain mépris pour toutes les jouissances humaines. En effet, toutes les choses terrestres, il les regardera comme une ombre, comme un rêve ; et, de même que s’il habitait dans les cieux, il ne désirera aucun des biens présents. Tel était saint Paul, l’apôtre qui a enseigné l’univers ; il s’écriait Est-ce que vous voulez éprouver la puissance de Jésus-Christ qui parle par ma bouche ? Il disait encore : Je vis, ou plutôt ce n’est plus moi qui vis, mais c’est Jésus-Christ qui vit en moi. Et ensuite : Si je, vis maintenant dans ce corps mortel, j’y vis en la foi. Voyez-vous cet homme, quoique revêtu d’un corps parler comme s’il jouissait d’un repos incorporel ?
4. Imitons-le donc tous, mortifions les membres de notre corps, et rendons-les incapables de pécher ; car c’est surtout ainsi que nous pourrons offrir à Dieu un, sacrifice qui lui sera agréable. Voyez-vous combien ce sacrifice est nouveau et étonnant ? Lorsque les membres sont morts, Dieu en accueille plus favorablement le sacrifice. Pour quel motif ? Parce que c’est un sacrifice spirituel ; qui n’a rien de sensible. Car, dans un sacrifice sensible, non seulement on doit rejeter la victime qui est privée de vie, mais celle même qui est vivante, si elle a quelque tache, ne pourrait jamais être acceptée à l’autel. Et ç’a été dès le principe l’objet d’une loi, non pas sans motif, mais afin que cet examen de victimes privées de raison, nous apprît à offrir, avec non moins de circonspection, ce sacrifice spirituel et cette victime raisonnable. Dans l’ancienne loi, c’était une tache que d’avoir les oreilles ou la queue coupée ; dans la nouvelle loi, c’est une tache que d’être pervers, libertin et débauché, d’aimer les richesses et ; en un mot, de pécher, Autrefois, la victime devait être pure et exempte de toute souillure, aujourd’hui, il faut mourir au monde pour être propre au sacrifice spirituel. Ne passons pas trop légèrement sur ces considérations, mais gravons-les profondément dans notre esprit, et tâchons de ne pas paraître inférieurs aux Juifs qui, dans les ténèbres, montrent une attention si scrupuleuse. Si les Juifs, assis auprès d’une faible lumière, ont fait preuve d’une si grande vigilance, à plus forte raison, nous, qui avons été juges dignes d’être éclairés par le Soleil de justice, qui avons quitté les ténèbres et qui avons été conduits comme par la main vers la vérité, devons-nous apporter la même prudence dans ce sacrifice spirituel. Ne passons pas légèrement sur ce que nous croyons de petits péchés ; mais demandons-nous compte, chaque jour, de nos paroles et de nos regards, et punissons-nous nous-mêmes, si nous voulons éviter les châtiments d’en haut. C’est pourquoi saint Paul dit : Si nous nous jugions nous-mêmes, nous ne serions pas jugés de Dieu. (1Cor. 11, 31) Car, si nous nous jugeons nous-mêmes ici-bas pour les fautes que nous commettons chaque jour, nous diminuons d’autant la sévérité du jugement de Dieu. Et, si nous sommes insouciants, lorsque nous sommes jugés de la sorte, dit l’Apôtre, c’est le Seigneur qui nous châtie. Auparavant, donc, condamnons-nous avec une grande sincérité, et descendons, à l’insu de tous, au tribunal de notre conscience ; alors examinons nos pensées, et portons une sentence juste, afin que notre esprit, frappé du péril qui nous menace, ne se laisse plus tromper, qu’il ré prime nos passions, et que, toujours vigilant, il ferme tout accès au diable. Car nous n’éprouvons d’échec, que par notre nonchalance, c’est l’expérience même qui nous l’enseigne. Si nous voulions nous réveiller un peu, nous pourrions faire tomber en poussière les embûches de notre ennemi ; et même, quand il nous fait tomber, si nous restons dans le même état, ce n’est pas à cause de sa tyrannie, mais à cause de notre peu d’énergie. Car ses victoires, il ne les doit pas à une force invincible, mais à sa ruse seule. Or, nous ne nous laisserons