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de ces vérités, mes bien-aimés, ne trahissons pas notre noble nature ; prouvons notre reconnaissance à notre magnifique bienfaiteur ; ne poursuivons pas les plaisirs d’un jour, pour atteindre des douleurs qui n’auront pas de fin ; tenons sans cesse nos regards fixés sur cet œil qui ne dort jamais, qui voit dans les replis les plus cachés de nos cœurs ; réglons ainsi notre conduite ; revêtus des armes de l’esprit, montrons la sagesse qui est en nous, et conquérons le secours d’en haut, afin de triompher, grâce au divin auxiliaire, de notre ennemi de chaque jour, de notre ennemi acharné ; afin de rendre inutiles toutes ses machinations, et de nous assurer la conquête des biens que Dieu a promis à ceux qui l’aiment. Que personne donc ne considère les fatigues de la vertu ; au contraire, calculons tous les profits qui récompenseront nos efforts généreux, et apprêtons-nous avec ardeur au combat ; car s’il est vrai que, dans les affaires de la vie humaine, animé de la fureur des richesses, on soit prompt à tout tenter ; que les périls de la mer, les naufrages, les attaques des pirates, n’ébranlent pas, ne ralentissent pas les courages, qui cependant ne poursuivent qu’un profit incertain ; quelle excuse pourrons-nous alléguer, quand on nous promet pour nos luttes généreuses, des, biens immortels, si nous ne nous y préparons pas avec le zèle ardent d’un désir sincère ? Comment pouvons-nous montrer tant d’ingratitude à notre bienfaiteur ? Comment pouvons-nous oublier les présents déjà faits, les promesses reçues ? Eh quoi ! perdant toute, mémoire, nous vivons au hasard et sans but, comme des troupeaux, sans aucun souci de notre âme, nous, chargeant le ventre jusqu’à le faire éclater ; triste victime de ce ventre, notre malheureux corps souffre et nous renvoie les mille maux que nous attire notre intempérance, les douloureux embarras de notre gourmandise, et nous laissons notre âme se dessécher par la faim ? Et cela, quoique l’âme soit à un si haut degré supérieure au corps, quoique l’âme, une fois partie, il ne reste plus qu’un cadavre. Ce qu’il faudrait, ce serait donner à l’un, donner à l’autre la nourriture qui convient à chacun d’eux ; et nous les perdons chacun d’eux, parce que nous ne gardons aucune mesure, engraissant l’un plus qu’il ne faut, forçant l’autre à mourir de faim. De là les paroles menaçantes que le Dieu de l’univers adresse aux Juifs, dans la fureur de son indignation Je vous donnerai, non la famine du pain ni la soif de l’eau, mais la famine qui veut entendre la parole du Seigneur (Amo. 8,11), nous montrant par là que cette première famine produit la maigreur du corps, que l’autre au contraire s’attaque à l’âme. Eh bien ! ce que le Seigneur leur déclarait d’une voix menaçante, comme on annonce un supplice, nous sommes maintenant les premiers à l’attirer sur nous ; et cela, lorsque Dieu nous a montré qu’il prend de nous un soin si vigilant, lorsqu’il a tout prévu, lorsqu’avec la lecture de l’Écriture sainte il nous a encore donné les exhortations des docteurs.
C’est pourquoi, je vous en conjure, mes bien-aimés, secouez tout engourdissement, réveillez-vous enfin, appliquez-vous, de tout votre zèle, au salut de votre âme ; c’est par là que vous vous concilierez tout à fait la bienveillance du Seigneur. Et nous, nous nous porterons à vous instruire, avec une ardeur encore plus vive, envoyant que vous mettez nos conseils en pratique. Quand l’agriculteur voit une terre féconde et de nature à donner beaucoup de fruits, il se met avec plus d’ardeur à la cultiver ; de même, nous aussi, si nous voyons vos progrès dans les œuvres due Dieu vous demande, si nous voyons que nos paroles deviennent les règles de votre conduite, nous ferons, pour vous instruire, des efforts plus courageux encore, parce que nous verrons bien que nous ne semons pas sur la pierre, mais dans une terre grasse et profondément fertile.
2. Voilà pourquoi ; chaque jour, nous vous adressons nos paroles ; c’est pour qu’elles vous profitent, c’est pour que vous grandissiez clans la vertu, c’est pour qu’en voyant votre avancement nous tressaillions de joie. Est-ce que, par hasard, nous prétendrions vous parler pour faire étourdiment retentir un vain bruit, pour recueillir vos éloges, pour vous entendre battra des mains en vous retirant ? Non, ce n’est pas là notre désir, loin de nous une ambition pareille ; ce que nous voulons, c’est votre utilité. La plus belle gloire pour moi, le plus magnifique des applaudissements, c’est le retour d’un pécheur à la vertu, c’est l’engourdissement secoué par nos paroles changée en ferveur. Voilà, pour moi, la plus belle des consolations, la vraie gloire ; voilà, pour vous, le profit incomparable, la richesse, le spirituel trésor. Je ne prétends pas contester votre zèle et je sais bien qu’instruits par Dieu vous pouvez, vous aussi,