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assure que, quand il ne se lèverait pas pour lui en donner, parce qu’il est son ami, il se lèverait, du moins, à cause de son importunité, et il lui en donnerait. (Lc. 11,8) Eh bien ! puisque nous voyons l’ineffable clémence de Notre-Seigneur, allons à lui, déclarons-lui, mettons-lui, pour ainsi dire, sous les yeux, un à un séparément tous nos péchés ; demandons-lui le pardon de nos fautes passées, afin de vivre dorénavant avec plus d’exactitude, et d’obtenir de lui une plus grande bienveillance. Mais revenons, s’il, vous plaît, à la suite de notre lecture. Loth, dit le texte, étant dans Ségor, monta et se retira sur la montagne, ainsi que ses deux filles avec lui, parce qu’ils avaient peur d’habiter dans Ségor, et Loth habita dans une caverne, et ses deux filles avec lui. (Gen. 19,30) Le juste, sous le coup de la crainte que lui avait inspirée le désastre de Sodome, s’en va, et, dit le texte, il habitait sur une montagne avec ses filles. II vécut dans la solitude, dans un lieu tout à fait dévasté, avec ses filles, séjournant sur la montagne. Alors, suivant le texte, l’aînée dit à la cadette : Notre père est vieux, et il n’est personne sur la terre qui viendra vers nous, selon la coutume de tous les pays. Viens, donnons du vin à notre père et dormons avec lui, afin que nous puissions conserver de la race de notre père. (Id. 31, 32) C’est avec un religieux respect, mêlé de tremblement et de crainte, mes bien-aimés, que nous devons écouter ces paroles de la divine Écriture. Rien n’a été consigné à la légère et sans dessein dans nos saints Livres ; tout ce qu’ils contiennent y a été mis pour notre utilité, et dans notre intérêt, même les choses que nous ne comprenons pas. En effet, nous ne pouvons pas savoir tout absolument, avec une parfaite exactitude ; mais si nous essayons d’expliquer, selon la portée de notre esprit, les endroits difficiles, c’est qu’ils contiennent, même ainsi, un trésor caché, profondément caché, et difficile à découvrir. Considérez donc comme l’Écriture, raconte tout, d’une manière parfaitement claire, et nous – montre le but que se proposent les filles de l’homme juste, d’une manière suffisante pour empêcher que qui que ce soit, considérant te fait, ne condamne, soit le juste, soit les filles du juste, comme si ce commerce était l’effet de l’incontinence. Comment donc l’Écriture excuse-t-elle les filles glu juste ? L’aînée, selon le texte, dit à la cadette : Notre père est vieux et il n’est personne sur la terre qui viendra vers nous selon la coutume de tous les pays. Considérez attentivement le but, et vous verrez qu’elles sont au-dessus de toute accusation. En effet, elles pensèrent qu’elles avaient assisté à une destruction générale du monde entier ; qu’il n’y avait pas un seul survivant ; elles virent ensuite la vieillesse de leur père. Donc, dit l’aînée, pour que notre race subsiste, pour que notre nom ne meure pas (c’était là en effet le plus grand souci des anciens hommes, d’étendre leur race par la succession de leurs enfants) ; donc, dit-elle, pour que notre race ne soit pas tout entière détruite, et cela surtout quand notre père est déjà accablé de vieillesse, quand il n’y a pas un homme qui puisse s’unir à nous, de telle sorte qu’il nous soit possible d’étendre et de laisser, après nous, notre race : Viens, dit-elle, pour prévenir ce malheur, donnons du vin à notre père. C’est comme si elle disait : notre père ne supporterait pas nos paroles, trompons-le avec du vin. Elles donnèrent donc cette nuit-là du vin à leur père, et l’aînée dormit avec lui sans qu’il sentît, ni quand elle se coucha, ni quand elle se leva. (Id. 33) Voyez-vous comment la divine Écriture excuse le juste, non pas une fois seulement, mais deux fois. D’abord, en montrant que ses filles l’ont trompé par le vin, elle a déclaré qu’elles n’avaient pas d’autres moyens de décider leur père ; et maintenant, je crois que c’est une disposition d’en haut qui a permis qu’il fût assez appesanti par le vin pour ignorer absolument tout, de manière à demeurer innocent. En effet, les péchés qui nous condamnent, ce sont ceux que nous faisons sciemment et volontairement. Voyez le soin que prend l’Écriture de rendre en faveur du juste le témoignage que lui, personnellement, ignora tout ce qui s’était passé. Mais ici une autre question s’élève, au sujet de l’ivresse. Il convient, en effet, de tout examiner, afin de ne laisser à la perversité impudente aucun prétexte de calomnie. Que dirons-nous donc de cette ivresse ? elle ne résulta pas pour lui autant de l’intempérance, que de la tristesse et de l’abattement.
5. Que personne donc ne se permette de condamner, soit l’homme juste, soit les filles de l’homme juste. Quelle ne serait pas notre démence, notre délire, quand nous voyons la divine Écriture les absoudre pleinement, bien