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délivrer ? Dans cette pensée, Paul, voulant exciter les Galates, les porter à prévoir le sort de ceux qui sont leurs membres, leur écrivait : Faisant réflexion sur vous-mêmes, craignant d’être tentés, vous aussi (Gal. 6,1), comme s’il leur disait : Si vous passez votre chemin, sans pitié, sans humanité pour votre frère tombé, peut-être arrivera-t-il qu’auprès de vous, si vous venez à tomber, un autre, comme vous, passera son chemin ; donc, si vous voulez qu’on fasse attention à vous, qu’on vous relève, s’il vous arrive de tomber, ne négligez pas les autres ; montrez la bonté parfaite, regardez, comme le plus riche trésor, de pouvoir sauver votre frère. Si vous considérez seulement que cet homme, que vous ne regardez pas, près duquel vous continuez votre chemin, sans vous arrêter ; est tellement en honneur auprès de Dieu, que le Seigneur, n’a pas refusé de répandre, pour lui, jusqu’à son propre sang, comme le dit le bienheureux Paul : Et ainsi par votre science, vous perdrez votre frère, pour qui Jésus-Christ est mort (1Cor. 8,11), comment ne rougirez-vous pas de votre indifférence au point de rentrer sous terre ? Si le Christ, pour cet homme, a répandu son sang, qu’y aura-t-il de merveilleux à ce que vous montriez au même homme votre affection par des paroles qui l’exhortent, qui le relèvent quand il sera tombé ; qui ramènent cet homme plongé, englouti peut-être au fond de l’abîme de la malignité ; qui le rendent à la lumière de la vertu, et ne lui permettent pas de se replonger dans les ténèbres de la corruption ?
5. Imitons donc, je vous en conjure, cet homme juste, et s’il faut même nous exposer au péril, pour sauver le prochain, ne reculons pas. Le péril ainsi affronté nous vaudra notre salut, l’intimité dans le sein du Seigneur. Considérez, en effet, je vous en conjure, comment cet homme juste a tenu tête à tout un peuple, à cette conspiration de ces êtres dépravés. Quelle douceur ! quel inexprimable courage il a témoigné, quoiqu’il n’ait pu, même par cette conduite, corriger ; dompter ce furieux délire. En effet, après qu’il eut prononcé ces paroles, qu’il eut montré une douceur si rare, quand il eut, par ses paroles, livré ses filles, comme de ses propres mains, que lui disent-ils ? Retirez-vous. (Id. 9) O profondeur de l’ivresse ! ô excès du délire ! Voilà comme se comporte cette brute effrénée, cette détestable concupiscence. Quand elle a vaincu la raison, elle ne supporte plus l’aspect de la vertu et de l’honnêteté. Il lui faut les ténèbres, la nuit, pour livrer ses combats. Retirez-vous, disent-ils, vous êtes venu ici comme un étranger parmi nous ; est-ce afin d’être notre juge ? Eh bien ! nous vous traiterons vous-même, encore plus mal qu’eux. Voyez avec quelle douceur l’homme juste leur parle ; avec quelle brutalité farouche ils lui répondent. C’est que – le démon leur à versé son ivresse ; c’est le démon qui marché à leur tête, et, sous sa conduite, ils attaquent l’homme juste, et ils lui disent : Vous êtes venu ici comme un étranger parmi nous ; est-ce afin d’être notre juge ? Nous vous avons reçu, disent-ils, comme un étranger ; êtes-vous donc devenu notre juge ? O excès de la perversité ! Il fallait rougir, il fallait recevoir avec respect le conseil de l’homme juste ; mais, semblables aux malades furieux qui veulent se jeter, même sur leur médecin, les voilà, eux aussi, qui lui disent : Eh bien ! nous vous traiterons plus mal qu’eux. Si tu ne veux pas, lui disent-ils, te taire, demeurer en repos, tu vas apprendre que ta protection n’aboutira qu’à les soustraire au danger, pour t’y faire tomber toi-même. Et ils se jetèrent sur Loth avec une grande violence. Voyez le courage de l’homme juste, qui tâche de résister à une si grande multitude. Lorsqu’ils étaient déjà prés de rompre les portes. Vous savez qu’en sortant, prévoyant la rage insensée de ce peuple, il avait fermé sa porte derrière lui, et ces impies, ces scélérats, ne supportant pas les avertissements de l’homme juste, le pressaient avec violence, et se préparaient à briser la porte. Mais l’expérience avait assez montré, d’une part la vertu de l’homme juste, son désir d’exercer l’hospitalité envers ceux qu’il regardait comme de simples voyageurs ; d’autre part, ce qu’il fallait attendre de tout ce peuple, ne conspirant que pour une infamie.
Les voyageurs à leur tour se révèlent, se manifestent. Ils ont vu que l’homme juste a rempli tout son devoir, ils font éclater leur puissance, et secourent ce juste qui subissait les violences d’une rage insensée. C’est pourquoi, dit le texte, ils prirent Loth par la main, et l’ayant fait rentrer dans la maison, ils en fermèrent la porte. Pour les hommes qui étaient dehors, ils les frappèrent de cécité, depuis le plus petit jusqu’au plus grand, de sorte qu’ils