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lui-même et a resplendi dans tout l’univers !
21. Si tu me demandes pourquoi, dans l’Ancien et dans le Nouveau Testament, il y a tant de périls, tant d’afflictions, tant d’embûches, connais-en la cause. Cette cause, quelle est-elle ? C’est que cette vie est en quelque sorte un lieu d’exercice, un gymnase, un combat, une fournaise, un atelier pour la vertu. Les corroyeurs prennent les peaux qu’ils ont reçues, et tout d’abord les resserrent, les étendent, les battent, les frappent contre les murs et contre les pierres, et par mille préparations les rendent propres à recevoir la teinture, ensuite ils leur donnent une belle couleur ; les orfèvres jettent l’or clans la fournaise, et le soumettent à l’action du feu pour le rendre plus pur ; les maîtres de gymnastique exercent les athlètes par beaucoup de fatigues clans le lieu d’exercices, ils attaquent leurs élèves avec plus d’ardeur que des adversaires, afin qu’ayant acquis dans le gymnase toute la vigueur désirable ils brillent dans les luttes véritables, et sachent éviter de donner aucune prise à leurs ennemis : Dieu n’agit pas autrement sur nous dans celte vie lorsqu’il veut former l’âme à la vertu. Il la serre, il la fond, il la livre à l’épreuve du malheur, afin que les faibles et les lâches soient brisés dans cette étreinte, et que les hommes vertueux deviennent ainsi plus vertueux encore, ne se laissent pas prendre par les embûches du démon, par les filets de satan, et soient tous dignes de recevoir les récompenses éternelles. Car, dit le Seigneur, la vertu qui n’a pas été tentée, n’est pas une vertu éprouvée. Et Paul : L’affliction produit la patience, et la patience, l’épreuve. (Rom. 5,3-4) Pour nous donner plus de fermeté et de patience, Dieu veut donc qu’on puisse examiner de toute manière si nous sommes de bon aloi. C’est pour cette raison qu’il a laissé Job souffrir tous ses maux, afin qu’il parût plus éclatant ; c’est pour cette raison qu’il a affligé les apôtres, afin qu’ils devinssent plus courageux et déployassent ainsi toutes leurs forces : assurément ce n’est point là une raison de peu de valeur. Aussi dit-il à Paul qui lui demandait de donner une fin, d’accorder une trêve à ses maux : A la grâce te suffit, car ma force s’accomplit dans la faiblesse. (2Co. 12,9) En effet, ceux qui n’ont pas encore la foi chrétienne peuvent retirer de là, s’ils sont attentifs, un très-grand avantage. Lorsqu’ils ont vu des justes maltraités, injuriés, emprisonnés, calomniés, entourés de pièges, décapités, brûlés, précipités à la mer et ne cédant pourtant à aucun de ces maux, dans quelle admiration n’ont pas dû les jeter ces athlètes soit dans le passé, soit dans le présent ! Ainsi donc, non-seulement les événements les plus malheureux ne peuvent scandaliser ceux qui veillent, mais ils leur permettent de tirer parti d’un si grand enseignement. Voilà pourquoi Dieu a fait entendre à Paul ces paroles : Ma force s’accomplit dans la faiblesse ; et on peut en avoir la preuve tant dans l’Ancien que dans le Nouveau Testament. Considère en effet ce qu’a dû souffrir Nabuchodonosor lorsque, sous les yeux d’une armée si nombreuse, il a été vaincu par trois enfants, trois esclaves, trois captifs, chargés de chaînes et exposés aux flammes, et vaincu au point de ne pouvoir triompher de ces trois corps soumis à son joug, placés sous sa main, de ces trois enfants chassés de leur patrie, privés de liberté, de considération, de puissance, de fortune, et vivant loin de tous leurs proches ! Si ce bûcher n’avait pas pu s’élever, ils n’auraient pas obtenu une récompense si éclatante, une couronne si glorieuse. Considère ce qu’a dû souffrir Hérode, lorsqu’il fut repris par un prisonnier enchaîné, lorsqu’il vit que ses fers ne lui avaient rien enlevé de la liberté de son langage, et qu’il aimait mieux périr que de renoncer à parler avec cette noble franchise ! Réfléchis-y : de tous les hommes qui vivaient alors ou qui sont nés plus tard, en est-il un seul qui ait été assez faible et assez lâche pour n’avoir pas retiré d’une telle conduite le plus grand avantage, soit qu’il l’ait vue, soit qu’il en ait entendu parler, si seulement il n’était pas tout à fait, dépourvu de jugement ! Car ne me parle pas des criminels, des insensés, des endormis, de ceux qui se donnent tout entiers aux soins du corps et qui sont plus légers que les feuilles ceux-là sont abattus, non-seulement par ces grands malheurs, mais même par tout événement, semblables au peuple juif, qui, soit qu’il mangeât la manne, ou qu’il se nourrît de pain, soit qu’il vécût en Égypte ou qu’il en fût sorti, que Moïse fût présent ou absent, était toujours également mécontent. Montre-moi ceux qui sont attentifs et éveillés, et considère combien ils ont dû gagner à voir une âme inaccessible à la crainte, une fierté que rien n’a pu asservir, un langage rempli de franchise, un