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recule devant une recherche qui dépasse les forces de son esprit, non-seulement il ne peut pas trouver, mais il ne peut pas même commencer à trouver une explication, parce qu’elle est impossible : et tu ne serais pas le plus malheureux des hommes, le plus plongé dans l’erreur et la démence, toi qui fais tout le contraire de l’Apôtre ! Encore, n’est-ce pas tout ce qu’il a dit : mais, comme il écrivait aux Corinthiens, et qu’il parlait de la science, montrant que quand nous aurions appris beaucoup de choses, les limites de nos connaissances seraient pourtant très-resserrées, il s’exprima en ces termes : Si quelqu’un croit savoir quelque chose, il n’a encore rien connu comme il faut le connaître. (1Co. 8,2) Ensuite, enseignant que notre science est très-incomplète, qu’un bien petit nombre de connaissances sont accordées au siècle présent, qu’un bien plus grand nombre sont réservées à l’avenir, il ajoutait : Nous ne connaissons qu’imparfaitement, et noue ne prophétisons qu’imparfaitement ; mais quand la perfection sera venue, alors ce qui est imparfait sera aboli. Il ne s’arrêta pas là : mais voulant faire voir quelle distance sépare cette science imparfaite de la parfaite, et combien grands sont ses vides, il le rendit sensible par plusieurs exemples, et il dit : Quand j’étais enfant, je parlais comme un enfant, je jugeais comme un enfant, je raisonnais comme un enfant ; mais lorsque je suis devenu homme, j’ai quitté ce qui tenait de l’enfant. Nous ne voyons maintenant que comme dans un miroir et dans des énigmes, mais alors nous verrons face à face. (1Co. 13,11-12) Vois-tu quelle différence il y a entre ces deux manières de connaître ? Elle n’est pas plus grande entre un enfant et un homme fait ; entre voir dans un miroir, dans des énigmes ou à travers quelque voile obscur et voir d’une vue claire, c’est-à-dire face à face. Pourquoi donc cette fureur, cette rage, cette audace avec laquelle tu scrutes témérairement les mystères que ta raison ne peut comprendre ? Pourquoi ne pas se laisser persuader par ces paroles de saint Paul : Qui donc es-tu, ô homme, pour contester avec Dieu ? Un vase d’argile dit-il à celui qui l’a fait : Pourquoi m’as-tu fait ainsi  ? (Rom. 9,20) Vois-tu quelle obéissance il réclame ? quel silence ? Ce n’est pas qu’il veuille nous enlever notre libre arbitre ; non, certes, mais il montre que celui qui se livre à ces recherches doit être aussi muet que l’argile, qui laisse le potier la façonner comme il veut, qu’il ne doit ni résister, ni montrer une vaine curiosité. C’est pourquoi il nous rappelle notre nature, et nous parle de l’argile et de potier, bien que le potier ne soit pas d’une autre nature que l’argile. Que si notre nature est la même, notre obéissance doit être aussi la même. Entre Dieu et nous la distance est infinie, qu’on nous examine dans notre nature, dans notre intelligence ou à tout autre point de vue : quel pardon obtiendra-t-il donc celui qui aura été assez téméraire et impudent pour s’enquérir de tout ce qu’a fait Dieu, son Créateur ? O homme ! considère qui tu es. Car, c’est là le sens de ces paroles de l’Apôtre : Qui es-tu ? N’es-tu pas de l’argile ? N’es-tu pas cendre et poussière, fumée, foin, herbe de foin ? Car ce sont là les comparaisons qui reviennent continuellement dans les prophètes, lorsqu’ils veulent exprimer la bassesse de notre condition. Au contraire, Celui que tu veux connaître est éternel, immuable, il existe toujours et de la même manière, il est sans commencement et sans fin, il est incompréhensible, il surpasse l’intelligence, il dépasse le raisonnement, il est inexplicable, ineffable, insaisissable, non pour moi ou pour toi seulement, mais pour les prophètes et pour les apôtres, mais pour ces puissances supérieures, pures, invisibles, immatérielles, qui jouissent dans le ciel d’une vie immortelle.
3. Aussi lorsque tu vois représentés les séraphins volant autour du trône sublime et élevé de la Divinité, se cachant de leurs ailes étendues les yeux, les pieds, le dos, le visage, et faisant, retentir le ciel des cris de leur admiration, ne crois pas qu’ils aient en effet des pieds et des ailes : car ce sont de purs esprits ; mais considère qu’on veut par ces images exprimer la nature insaisissable, incompréhensible de Celui qui est assis sur le trône. (Isa, 6,2-3) Car mime pour eux Dieu est incompréhensible et insaisissable. Il s’abaisse pour se mettre à notre portée, mais jamais on ne l’a vu tel qu’il est. Dieu, en effet, n’est pas assis, ne siège pas sur un trône, il n’est pas renfermé dans un lieu. Mais, même lorsqu’on le représente assis, siégeant sur un trône au milieu des anges (image d’un Dieu qui se met à notre portée, mais qui n’est pas réellement assis), ces anges ne peuvent pas le regarder ; par l’impuissance où ils