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de sortir. La vie présente est une hôtellerie. Nous y sommes entrés, nous dépensons la vie présente ; prenons soin d’en sortir avec une belle espérance, ne laissant rien ici, afin de ne pas être là-bas sans ressources. Quand vous entrez dans une hôtellerie, que dites-vous à votre serviteur ? Voyez bien où vous mettez les bagages ; ne laissez rien ici, n’égarez rien de si petit, du si mince que ce soit, que nous puissions tout remporter à la maison. Faisons de même quant à la vie présente ; regardons la vie comme une hôtellerie, et ne laissons rien dans l’hôtellerie, mais emportons tout dans la cité, dans la métropole. Vous êtes des voyageurs, des passants, disons mieux, vous êtes moins que des voyageurs. Comment cela ? je vais vous le dire. Le voyageur sait quand il entre dans l’hôtellerie ; et quand il en part, car il est le maître d’en sortir comme d’y entrer mais moi qui entre dans l’hôtellerie, c’est-à-dire dans la vie présente, quand dois-je en sortir ? je l’ignore. Et parfois je me ménage pour longtemps des provisions, et voilà le Seigneur qui tout à coup m’appelle : Insensé ! pour qui ce que tu as amassé ? car, cette nuit même, on te prend ton âme. (Luc. 12,20) Incertaine l’heure du départ ; mal assurée la possession ; des précipices sans nombre ; partout les flots grondants. Quelle fureur de s’attacher à des ombres ? pourquoi, abandonnant la vérité, cours-tu après des ombres ?
4. Je dis ces choses, et je ne cesserai pas de les redire, au risque de vous causer de la douleur, je veux porter les mains sur ces plaies, non pour ceux qui sont tombés, mais pour ceux qui sont debout. Ceux – là ont disparu ; il n’en est plus question ; mais ceux qui sont restés debout se sont affermis au spectacle de ces malheurs. Eh bien ! me dit-on, que devons-nous faire ? une seule chose, détestez les richesses, et embrassez ce qui vous fait vivre. Rejetez les biens de ce monde, je ne dis pas tous, mais retranchez le superflu. Ne désirez pas le bien d’autrui, ne dépouillez pas la veuve, ne pillez pas l’orphelin, ne volez pas sa maison. J’oublie les personnes, mes paroles ne font en ce moment que proclamer des vérités. Si quelqu’un se sent attaqué par sa conscience, à lui la faute, non à mon discours. À quoi bon ravir ce qui excite la basse envie ? Ravissez ce qui assure la couronne. Ne soyez pas un ravisseur de la terre, mais du ciel.C’est à la violence qu’appartient le royaume des cieux, c’est la violence qui le ravira. (Mat. 11,12) Pourquoi ravir lesbiens du pauvre qui vous accuse ? Ravissez les trésors du Christ qui vous approuve. N’avez-vous pas compris ce qu’il y a d’insensé dans cette fureur ? Vous ravissez au pauvre le peu qu’il possède ? Le Christ vous dit : c’est à moi qu’il faut ravir, et je vous saurai gré de votre tapine ; ravissez-moi mon royaume parla violente. La royauté d’en bas, si vous voulez la ravir, si vous avez seulement la pensée de la ravir, le châtiment est sur vous ; mais la royauté d’en-haut, si vous ne voulez pas la ravir, c’est alors aussi que vous serez châtiés. Où sont les biens de la terre, là s’exerce l’envie ; mais où sont les biens spirituels, c’est là que règne la charité. Faites de ces pensées vos méditations de chaque jour, et, pour avoir vu un homme porté sur un char, couvert d’un vêtement de soie, fier et triomphant, ne soyez pas, deux jours encore après ce spectacle tourmenté, bouleversé, troublé. Ne louez pas le riche, mais seulement le juste ; ne maltraitez pas le pauvre, mais apprenez à porter sur toutes choses un jugement droit et que rien ne fausse.
Ne vous séparez pas de l’Église, car l’Église a une puissance sans égale. Votre espérance, c’est l’Église ; votre salut, l’Église ; votre refuge, l’Église. Elle s’élève plus haut que le ciel, elle s’étend plus au large que la terre. Jamais vieillissante, toujours jeune. C’est pour quoi l’Écriture, considérant sa solidité inébranlable, l’appelle une montagne ; son incorruptibilité, une vierge ; sa magnificence ; une reine ; à cause des liens qui l’unissent à, Dieu, elle la nomme sa fille ; à cause de la fécondité de son sein, elle lui compte sept enfants ; elle a des termes sans nombre pour exprimer sa noblesse. Car, de même que son maître et Seigneur a beaucoup de noms, qu’off l’appelle le Père, qu’on l’appelle la voie, qu’on l’appelle vie, lumière, bras, propitiation, fondement, porte ; qu’on l’appelle impeccable ; trésor, Seigneur, Dieu, Fils, Fils unique, forme de Dieu, image de Dieu ; un seul nom ne suffit-il donc pas pour comprendre le tout ? nullement ; nous avons besoin de ces milliers de termes pour apprendre sur Dieu bien peu de chose ; de même ! Église a aussi des noms en foule. On l’appelle vierge, elle qui avait été une impudique : car le prodige accompli pat l’époux, c’est qu’il a fait d’une courtisane une vierge. O nouveauté, ô étrangeté ! Les hymens de la terre sont la fin de la virginité ; l’hymen