Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 4, 1864.djvu/268

Cette page n’a pas encore été corrigée

négligence pour les intérêts d’autrui, nous attire des châtiments, que personne ne cherche sa propre satisfaction, de l’Apôtre, mais le bien des autres (1Cor. 10,24) ; quel châtiment bien plus terrible nous frappera, si nous négligeons nos enfants. N’ai-je pas mis ton enfant dans ta maison, dès le commencement, dit le texte ? ne t’ai-je pas établi son précepteur, son maître, son protecteur, son juge ? ne t’ai-je pas remis entre les mains tout pouvoir sur lui ? Je t’ai confié le soin de pétrir, de façonner cette âme molle et délicate ? quel pardon mérites-tu si, pour quelque résistance, tu l’abandonnes ? que pourrais-tu dire ? que c’est une nature rétive, qui ne supporte pas le frein ? Mais c’est tout d’abord ce qu’il fallait prévoir ; quand il supportait le frein, quand il était dans la première jeunesse, il fallait prendre le soin de le brider, l’habituer, le façonner au devoir, châtier les vices dont son âme est malade. La culture était facile ; c’était alors qu’il fallait arracher les épines ; dans un âge encore tendre, on les eût plus facilement extirpées ; on n’aurait pas vu les passions grandir, par la négligence du surveillant, et défier qui les veut combattre. Voilà pourquoi, dit le Sage : Fléchis-lui le cou, quand il est jeune (Sir. 7,23) ; c’est-à-dire, à l’heure où il est plus facile de le former par l’éducation. Et l’Écriture ne se contente pas du précepte, elle Se met à l’œuvre avec vous. Comment ? Celui qui aura maudit son père ou sa mère, sera puni de mort. (Ex. 21,17) Voyez-vous quelle crainte elle inspire ? quel redoutable rempart elle construit pour vous ? quelle force elle vous donne ? Quelle excuse pourrons-nous donc alléguer ? Comment ! si nos enfants nous outragent, Dieu n’épargne pas même leur vie ; et nous, quand nous les voyons outrager Dieu, nous sommes sans colère, et nous les supportons ! Moi, dit le Seigneur, je ne refuse pas de mettre à mort qui t’outrage, et toi, tu ne veux même pas qu’on attriste d’un mot celui qui foule aux pieds mes lois ! Eh ! quelle pourrait être l’excuse d’unetelle conduite ? Vous voyez qu’on outrage son Créateur, et vous ne vous indignez pas, répondez-moi, et vous ne tremblez pas, et vous n’avez pas de réprimande pour l’enfant, et cela quand vous savez qu’il enfreint la loi de Dieu ! ce n’est pas que l’outragé en reçoive aucun préjudice (Dieu n’a rien à perdre), mais l’enfant n’est-il pas à sauver ? qui se livre contre Dieu à des outrages insensés, à bien plus forte raison, insultera son père, et dégradera son âme.
8. Donc soyons vigilants, puisque nous savons que, s’ils rendent à Dieu ce qui lui est dû, nos enfants jouiront, même dans la vie présente, d’un brillant et glorieux nom. A l’homme vertueux et modeste les respects de tous, tous les honneurs ; fût-il le plus misérable de tous les pauvres ; le méchant, le pervers n’excite que répulsion et que haine, vît-il abonder chez lui les richesses à grands flots. Et non seulement votre enfant sera, pour les autres, un sujet de vénération, mais vous-même, son père, vous, le chérirez plus encore ; car, à l’amour qui résulte de la, nature, se joindra l’amour non moins vif qui s’attache à la vertu, et non seulement vous le chérirez plus, mais ce cher objet vous sera plus utile, vous honorant, vous servant, vous soutenant dans votre vieillesse. De même que les ingrats envers Dieu ; méprisent leurs parents, de même ceux qui honorent leur Créateur entourent leurs parents d’hommages et de vénération. Donc voulez-vous être considéré de Dieu et des hommes, assurer le doux bonheur de votre vie, vous préserver des châtiments à venir, faites de votre enfant l’unique objet de vos soins. Ceux qui négligent leurs enfants, fussent-ils d’ailleurs honnêtes, tempérants et sages, subiront, pour cette négligence, le plus terrible des châtiments, ce que prouve une vieille histoire, que je vais vous raconter.
Il y avait chez les Juifs un prêtre honnête d’ailleurs et sage que l’on nommait Héli. Cet Héli avait deux fils, tombés dans les derniers excès de la dépravation ; il ne les réprimandait pas, il les laissait faire : c’est-à-dire il les réprimandait bien, il cherchait à les retenir, mais il n’y mettait pas le soin suffisant, il manquait de sévérité. (1Sa. 2,11). Il aurait dû employer les verges, il aurait dû les chasser de la maison paternelle, user de tous les moyens de correction ; eh bien ! non, il se contentait de leur adresser des exhortations, (tes conseils ; il leur disait : Ne faites pas cela, mes enfants, ne faites pas cela, car je n’ai pas les oreilles flattées de ce qui vient à mes oreilles à cause de vous. (1Sa. 2,21). Que dis-tu ? Ils ont outragé Dieu et tu les appelles tes enfants ? Ils ont méconnu leur Créateur et tu les reconnais ? Voilà pourquoi l’Écriture dit qu’il ne les réprimandait pas, c’est que la réprimande n’est pas un conseil quelconque, c’est un moyen énergique, mordant, qui mesure, à la gravité de la blessure,