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nées, généreuses, ayant conscience de leur dignité, sans terreur, ni châtiments embrassèrent la vertu, tandis que le reste des Juifs suivit la pente du mal et eut besoin du frein de la loi. Quand ils fabriquèrent le veau d’or et adorèrent des statues, ils entendirent ces mots : Le Seigneur ton Dieu est le seul Seigneur. (Deu. 6,4). Quand ils commirent des meurtres et des adultères, ils entendirent ces mots : Tu ne tueras point, tu ne seras point adultère, et ainsi des autres commandements.
7. Ce n’est donc pas la condamnation de la loi qu’elle ait employé la crainte et les châtiments comme on fait pour instruire et corriger des esclaves méchants : c’est sa plus belle louange, sa gloire la plus rare d’avoir arraché les hommes au mal où ils se livraient, de les avoir par sa force propre, délivrés du crime, corrigés et rendus dociles à la grâce, de leur avoir ouvert un chemin vers la philosophie du Nouveau Testament. Car c’était le même Esprit qui dictait les lois de l’Ancien Testament et celles du Nouveau, malgré leurs différences. C’est ce que Paul faisait entendre quand il disait : Parce que nous avons le même esprit de foi, selon qu’il est écrit : J’ai cru, c’est pourquoi j’ai parlé.
Et ce n’est point seulement pour cela qu’il disait : le même Esprit, mais pour une cause non moins importante. Je l’aurais expliqué aujourd’hui, mais je crains que mes enseignements répandus à flots trop abondants ne s’échappent de votre mémoire. Je réserve donc cette explication pour un, prochain entretien, vous exhortant seulement à garder de celui-ci un entier souvenir, à observer exactement mes conseils et à joindre la sagesse pratique à la pureté du dogme. Il faut que l’homme de Dieu soit parfait et disposé à toute sorte de bonnes œuvres. (2Ti. 3,17). À rien ne vous servirait la pureté du dogme si votre vie était impure, de même qu’une vie irréprochable vous serait inutile sans la pureté de la foi. Afin donc de nous assurer de parfaits avantages, affermissons-nous des deux côtés, que notre vie se pare des nobles fruits de toutes vertus, mais principalement de celui de l’aumône dont je vous ai déjà parlé, et qu’il faut pratiquer avec zèle, avec abondance. Quiconque sème peu, dit l’Écriture\it, récolte peu ; et celui qui sème dans les bénédictions récoltera dans les bénédictions. (2Co. 9,6) Que signifient ces paroles, dans les bénédictions ? c’est-à-dire avec abondance. Dans les choses matérielles, la semence et la moisson sont de même nature. Car celui qui sème répand dans la terre du froment, de l’orge ou d’autres sentences pareilles, et quand il fait la moisson, il récolte les mêmes grains. Il n’en est point de même de l’aumône. Vous semez l’argent et vous récoltez la paix devant Dieu ; vous donnez des richesses et vous recevez en échange-le pardon de vos fautes ; vous distribuez du pain et des vêtements, et en récompense vous vous préparez le royaume du ciel et mille biens que l’œil de l’homme ne peut voir, ni son oreille entendre, ni sa pensée concevoir. Le premier de ces biens est que vous devenez semblables à Dieu, autant qu’il est possible à l’homme. Car c’est de l’aumône et de la charité que le Christ avait parlé quand il ajoutait : Afin que vous deveniez semblables à votre Père qui est dans les cieux, qui fait luire son soleil sur les bons et sur les méchants et fait tomber la pluie sur les justes et sur les injustes. (Mat. 5,45) Vous ne pouvez faire luire le soleil, ni faire tomber la pluie, ni répandre vos bienfaits sur toute la face de la terre. Mais il suffit que vous employiez les biens que vous avez en bonnes œuvres pour devenir semblables à Dieu qui fait luire le soleil autant qu’il est possible à l’homme de devenir semblable à Dieu.
8. Écoutez bien toutes ces paroles : sur les bons et sur les méchants, a-t-il dit. Agissez de même. Quand vous ferez l’aumône, ne recherchez point la vie passée, ne demandez pas compte de la conduite. Aumône signifie commisération ; elle est ainsi appelée, parce qu’il n’en faut point priver même ceux qui en sont indignes. Car celui qui est miséricordieux accorde sa commisération non au juste, mais au pécheur. Car le juste est digne de louanges et de couronnes ; le pécheur a besoin de commisération et de pardon. Ainsi, nous imiterons Dieu, en donnant aussi aux méchants. Songez en effet combien il y a sur la terre de blasphémateurs, de scélérats, de fourbes, d’hommes souillés de tous les vices ! Dieu leur donne leur pain de chaque jour, pour nous apprendre à étendre notre charité sur tous les hommes. Mais nous faisons tout le contraire. Car, non seulement nous repoussons les méchants ; les pervers ; mais qu’il se présente un homme en bonne santé, que sa probité, son amour de la liberté, sa paresse même, s’il faut le dire,