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leurs regards, dit-il, sur celui qu’ils ont transpercé. (Zac. 12,10) Is. parlant aussi de la croix, dit : Comme une brebis, il a été mené à la boucherie, et, comme un agneau sans voix devant celui qui le tond, il n’ouvre pas la bouche. Il est resté humilié pendant qu’on le jugeait. (Is. 53,7-8)
2. Remarquez avec moi que chacun de ces prophètes parle de ces événements comme de choses passées, et montre par la forme même du langage qu’ils arriveront certainement, infailliblement. David aussi décrivant le jugement, disait : Pourquoi les nations ont-elles frémi ? et les peuples médité des choses vaines ? Les rois de la terre se sont levés et les princes se sont ligués contre le Seigneur et contre son Christ. (Ps. 2,1-2) Outre le jugement, la croix, ce qui se passa sur la croix, il annonce encore que le traître qui livrera le Christ vivait avec lui et mangeait à la même table : Celui qui mangeait mon pain s’est élevé orgueilleusement contre moi (Ps. 60,40) Il prédit même la parole que le Christ prononcera sur la croix : Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’avez-vous abandonné ? (Ps. 21,2) Il parle aussi de son sépulcre : Ils m’ont placé au fond d’un tombeau, dans les ténèbres, dans les ombres de la mort (Ps. 7,6) ; de sa résurrection : Vous ne me laisserez point dans les enfers et vous ne permettrez point que votre Saint voie la corruption (Ps. 15,10) ; de son ascension : Dieu s’est élevé aux acclamations de joie : le Seigneur est monté au son de la trompette. (Ps. 46,6) Il siégera à la droite de son Père : Le Seigneur a dit à mon Seigneur : Asseyez-vous à ma droite, jusqu’à ce que je fasse de vos ennemis l’escabeau de vos pieds. (Ps. 109,1) Isaïe nous donne la cause de ses souffrances, en disant : C’est pour les péchés de mon peuple qu’il est conduit à la mort. (Is. 53,8) C’est parce que tous se sont égarés comme des brebis errantes qu’il a été immolé. Et voici le bien qui en résulte : Sa blessure nous a guéris. (Id. 5) Et encore : Il a expié les péchés de tous. Ainsi les prophètes ont connu d’avance la passion, sa cause, les biens qui en découleraient pour nous, la sépulture, la résurrection, l’ascension, la trahison ; le jugement, et ils ont fait de tout une description exacte ; et celui qui les a envoyés, qui leur a fait annoncer ces choses, les aurait lui-même ignorées ! Quel homme sensé pourrait le dire ? Vous voyez qu’il ne faut pas s’attacher simplement aux paroles.
Mais ce n’est pas la seule chose difficile à expliquer ; ce qui suit ne l’est pas moins. Car que dit-il ? Mon Père, s’il est possible, que ce calice passe loin de moi. Vous voyez non seulement qu’il ignore, mais encore qu’il refuse le crucifiement : car voici ce qu’il dit : S’il est possible, que je ne sois pas crucifié, que je ne sois pas mis à mort : et cependant lorsque Pierre, le chef des apôtres, dit : A Dieu ne plaise, Seigneur ! cela ne vous arrivera point, il le reprit si fortement qu’il lui dit : Retire-toi de moi, Satan : tu es un scandale pour moi, parce que tu ne goûtes pas ce qui est de Dieu, mais ce qui est des hommes (Mt. 16,29) ; et cela, bien qu’un peu auparavant il l’eût appelé bienheureux. Ainsi il lui paraissait si extraordinaire de n’être pas crucifié, qu’à celui qui avait reçu du Père une révélation spéciale, à celui qui avait été proclamé bienheureux, à celui qui avait pris en main les clefs des cieux, il donne le nom de Satan, de pierre de scandale, et le réprimande comme ne goûtant pas les choses de Dieu, pour lui avoir dit : A Dieu ne plaise, Seigneur ! il ne vous arrivera pas d’être crucifié. Eh bien ! après avoir ainsi repris son disciple, après s’être ainsi indigné contre lui jusqu’à l’appeler Satan malgré les éloges qu’il venait de lui donner, et tout cela pour lui avoir dit : Vous ne serez pas crucifié, comment en arrive-t-il lui-même à ne vouloir plus être crucifié ? Comment, en outre, faisant le portrait du bon pasteur, dit-il que la plus grande preuve de sa vertu c’est de s’immoler pour ses brebis ? Car voici ses paroles : Moi, je suis le bon pasteur : le bon pasteur donne sa vie pour ses brebis. Et il ne s’en tient pas là ; il ajoute : Mais le mercenaire et celui qui n’est point pasteur, voyant le loup venir, laisse là les brebis et s’enfuit. (Jn. 10,11) S’il est d’un bon pasteur d’endurer même la mort, et d’un mercenaire de ne pas vouloir s’y exposer, comment, tout en disant qu’il est le bon pasteur, demande-t-il à n’être pas immolé ? Comment peut-il dire : Je donne ma vie de moi-même? (Id. 18) Si c’est de vous-même que vous la donnez, pourquoi demandez-vous à un autre de rie pas la donner ? Comment saint Paul trouve-t-il en cela matière a le louer ? disant : Qui étant en la forme de Dieu, n’a pas truque ce fût pour lui une usurpation de se faire égal à Dieu, mais il s’est anéanti lui-même, prenant la forme d’esclave, ayant été fait semblable aux hommes et reconnu