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fait de toi un objet d’opprobre et de risée pour toute la ville, au point qu’il ne te reste plus même la consolation d’être plaint. Car il est écrit : Qui donc aura pitié de l’enchanteur mordu par un serpent et de tous ceux qui approchent des bêtes féroces ? (Sir. 12, 13)
Je passe sous silence les pertes d’argent, les défiances quotidiennes, l’arrogance, l’orgueil, l’insolence dont les courtisanes accablent leurs folles victimes, supplice mille fois plus douloureux que la mort. Tu ne supportais pas de ta femme une parole un peu vive, et tu courbes la tête sous les soufflets d’une prostituée. Et tu ne sens point de honte, tu ne rougis pas, tu ne souhaites pas que la terre s’entr’ouvre pour t’engloutir ? Comment oseras-tu venir à l’église, et élever les mains vers le ciel ! Comment invoquer Dieu avec cette bouche souillée par les baisers d’une courtisane ? Et tu n’as pas peur, tu ne trembles pas, dis-moi, que la foudre, tombant du ciel, n’embrase ce front sans pudeur ? Tu as pu cacher à ta femme ta trahison, mais tu ne la cacheras pas à l’œil qui ne s’endort point ; car, à cet adultère qui disait Les ténèbres et des murs m’entourent ; qu’ai-je à craindre ? Le Sage a répondu que les yeux du Seigneur ont mille fois plus de lumière que le soleil, pour regarder les œuvres des hommes. (Sir. 23, 26-28) Voilà pourquoi Paul a dit toutes ces choses : Que chaque homme ait sa femme, et chaque femme son mari ; que le mari rende à sa femme l’affection qu’il lui doit, et pareillement la femme à son mari. (1Co. 7, 2-3) Un miel, découle des lèvres de la courtisane, lequel, sur le moment, flatte ton gosier ; mais plus tard tu le trouveras plus amer que le fiel, et plus acéré qu’un glaive à deux tranchants. (Prov. 5, 3-4)
Il y a du poison dans le baiser de la courtisane, un poison secret et dissimulé. Pourquoi donc courir après un plaisir réprouvé, pernicieux, qui cause des plaies incurables, au lieu de vivre dans le bonheur et dans la sécurité ? Auprès de ta femme légitime tu trouves à la fois plaisir, sûreté, délassement, respect, considération et bonne conscience ; là, au contraire, tout est amertume, tout est dommage, et tu es sous le coup d’une accusation perpétuelle. Car, à supposer même que personne ne t’ait vu, ta conscience ne cessera de porter témoignage contre toi ; vers quelque lieu gaie tu t’échappes, partout te suivront les reproches, les cris formidables de cet implacable accusateur. Si donc vous recherchez le plaisir, fuyez le commerce des courtisanes. Car il n’y a rien de plus pénible que cette fréquentation, rien de plus intolérable que ces rapports, rien de plus infâme que cette société. Qu’elle soit ta biche la plus chère, ton faon de prédilection ; que ta fontaine soit la source où tu puises. (Prov. 5, 19 et 15) Quand tu as sous la main une source d’eau limpide ; pourquoi courir à un marais fangeux qui exhale l’odeur de la géhenne et des inexprimables tourments ? Quelle est ton excuse ? ton titre à la miséricorde ? Si ceux qui, tombent dans la fornication avant le mariage sont punis et expient leur faute, comme celui, qui était revêtu d’habits sordides, à plus forte, raison les fornicateurs mariés. Car, dans ce cas, le grief est double et triple, et parce que, les consolations dont ils jouissent ne les ont pas empêchés de se jeter dans de pareils désordres, et parce que leur crime n’est plus compté seulement pour fornication, mais encore pour adultère, ce qui est le plus grave des péchés.
Ne cessons donc point de nous répéter à nous-mêmes et de répéter à nos femmes ces maximes ; et c’est pourquoi je veux finir moi-même sur ces paroles : À cause de la fornication, que chaque homme ait sa femme, et chaque femme son mari. Que le mari rende à sa femme l’affection qui lui est due, et pareillement la femme à son mari. La femme n’a pas puissance sur son corps ; c’est le mari. De même, le mari n’a pas puissance sur son corps, c’est la femme. Conservons précieusement ces paroles dans notre mémoire ; sur la place publique, à la maison, le jour, le soir, à table, au lit, partout enfin ; méditons-les, habituons nos femmes à nous les citer, à se les entendre citer par nous, afin qu’avant passé chastement, la vie présente, nous soyons admis au royaume des cieux, par la grâce et la charité de Notre-Seigneur Jésus-Christ, par qui et avec qui, gloire au Père et au Saint-Esprit, dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.